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pourraient bien dégringoler encore rudement d’ici à quelques années. Partout l’on prêche le retour à la terre, l’estime de la profession agricole, et bientôt les cours commerciaux ou classiques et les petits métiers qui alimentent l’exode rural depuis quatre-vingts ans ne seront plus les seules carrières ouvertes aux fils de cultivateurs et même de citadins : les terres en bois debout constitueront de plus solides héritages. Mais comment y diriger notre peuple ? Par les méthodes mêmes qui ont rempli de nos gens les usines américaines, qui ont peuplé l’Ouest canadien et que nous enseigne le bon sens : en instruisant nos campagnards des avantages des terres nouvelles, en les conduisant par groupes compacts afin qu’on puisse les aider et qu’ils puissent s’entraider aux heures pénibles des commencements.

de la réclame !

Nil volitum nisi præcognitum, dit un axiome de philosophie. On ne veut une chose qu’après en avoir pris connaissance, ou, au sens large, on ne monte dans le bois que si ça doit payer. Des milliers de hâbleurs experts en réclame pour les usines américaines ont fait chez nous des razzias de déserteurs ; jamais colon heureux n’est venu dire son avoir, ses labeurs et ses espérances. Pour beaucoup de ruraux, la colonisation est un vocable aussi vide et abstrait que la métaphysique, le rayon terrestre ou le carré de l’hypothénuse.

Qui s’est jamais avisé de dire clairement, efficacement, au point de vue affaires, les avantages et les facilités de la colonisation ? Dans les discours patriotiques de nos 24 juin, on brandit énergiquement devant un enthousiaste auditoire de couturières et de rentiers la vaillante hache du défricheur et le flambeau de la civilisation ; à chaque geste la forêt recule sans doute, un frisson d’épouvante