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même aujourd’hui dans nos solitudes fertiles du Nord et du Sud-Est, si le clergé peut se mettre à la tête d’un vaste mouvement.

« L’œuvre de la colonisation ne recrute que des apôtres, écrivait l’honorable M. Royal, il y a cinquante ans. Partout où le prêtre prend les devants, la colonisation réussit, les paroisses se forment, les églises s’élèvent et la forêt recule. » Et son Éminence le cardinal Taschereau le répétait en 1890, à l’inauguration du Mérite Agricole : « Sans doute que nous devons déplorer l’exode des Canadiens aux États-Unis ; cependant, il ne faut pas nous décourager. Pendant les vingt années de mon épiscopat, cinquante-trois paroisses nouvelles ont été créées. Il y a un proverbe qui dit que le sucre attire les enfants : de même aussi un curé résidant attire les colons. »

Trouvera-t-on dans les vieux diocèses assez de prêtres, pour guider vers les pâturages que Dieu nous offre, les troupeaux errants de l’Église ? Les ouvriers sont toujours bien peu nombreux pour la moisson, il est vrai ; mais l’Église, — elle le comprend et elle le fera, — doit agir, prêcher la croisade, faire l’impossible pour arrêter les fourvoiements de ses ouailles.

Si les autorités civiles d’aujourd’hui veulent sérieusement la fidélité au sol et même le retour à la terre, si M. le ministre de la Colonisation veut renouveler en faveur des cantons neufs l’appel au clergé de son collègue à l’Agriculture, recommandant l’économie et l’accroissement de production des vieilles fermes, l’Église sera tout heureuse d’offrir son concours et ses moyens d’action, et l’on peut tout espérer de cette union conquérante des pouvoirs civil et religieux. Mais si l’on ne doit rien attendre des gouvernants que de belles paroles, de jolies brochures, de l’inertie et des lois tracassières, à cette heure grave où tous les clairvoyants s’inquiètent des problèmes d’après-guerre,