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Page:Duhamel - La Vie des martyrs.djvu/119

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parvenir à l’entamer sensiblement. Les traits tirés par une nuit de travail désespéré, médecins et infirmiers allaient, venaient, choisissaient dans le tas des blessés, et en soignaient deux pendant qu’il en arrivait vingt.

En attendant notre matériel, nous visitions les pavillons. Quelques jours auparavant, on traitait encore là des contagieux. Une désinfection hâtive avait laissé les lieux saturés d’une vapeur de formol qui déchirait la gorge sans parvenir à masquer l’ignoble odeur des hommes entassés. On les voyait rassemblés par tas dans les pièces, autour des poêles, étendus sur les couchettes des dortoirs ou effondrés sur le dallage des corridors.

Dans chaque salle du bâtiment inférieur, il y en avait trente ou quarante, de toutes armes, qui somnolaient, geignaient et sortaient de temps à autre pour gagner péniblement les latrines ou chercher, un « quart » à la main, quelque chose à boire.

Au fur et à mesure que nous avancions dans notre visite, le spectacle s’aggravait : on avait refoulé dans les salles du fond et dans le pavillon supérieur une quantité de grands blessés qui se