Page:Duhamel - La Vie des martyrs.djvu/160

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Un petit scarabée traverse le chemin devant moi ; je l’écrase à moitié par mégarde, mais il prend une fuite éperdue. Il a dit aussi à sa manière : « Non, vraiment, ton ami n’a pas raison. »

« Dis-lui qu’il a tort ! » chante l’essaim des bêtes qui bourdonnent autour du tilleul.

Et même un long coup de canon qui traverse toute la campagne en grognant, crie, lui aussi : « Il a tort ! Il a tort ! »


*


Dans la soirée, le médecin-chef est revenu voir Léglise qui lui a dit, avec la même sombre gravité :

— Je ne veux pas, Monsieur le médecin-chef, j’aime mieux mourir.

Nous descendons au jardin, et le patron me dit cette phrase étrange :

— Essayez de le convaincre. Je finis par avoir honte de lui demander un tel sacrifice.

Et moi, n’ai-je donc pas honte !

Je consulte la nuit chaude, parée d’étoiles ; je suis bien sûr, maintenant, qu’il a tort ; mais je ne sais comment le lui dire. Qu’ai-je à lui offrir en