Page:Duhamel - La Vie des martyrs.djvu/70

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les mains de Michelet, objets peu recommandables pour cet usage. Michelet disait en riant :

— Ben, finis : j’ai les mains sales.

Et le pauvre Paga d’embrasser les bras nus et velus en disant avec angoisse :

— Si les mains sont sales, les bras sont bons.

Hélas ! que sont-ils devenus, tous ceux que, pendant des jours et des nuits d’inquiétude et de patient labeur, j’ai vus peu à peu se dégager du sombre empire de la nuit et renaître à la joie ? Qu’est devenu le tison poudreux à qui une haleine fervente finissait par arracher des étincelles ?

Qu’êtes-vous devenues, vies précieuses, pauvres âmes extraordinaires, pour qui j’ai livré tant d’obscures grandes batailles, et qui êtes reparties dans l’aventure ?

Vous, Paga, petit bonhomme, où êtes-vous ? Vous souvient-il encore du temps où je faisais vos deux pansements à tour de rôle, et où vous me disiez avec sévérité :

— La jambe, aujourd’hui ! La jambe seulement : Ce n’est pas jour de pied.