Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/27

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

garder comme physiquement recevables, car aucun tourneur, semble-t-il, n’en pouvait construire une représentation faite de bois ou de métal. Il est donc clair que les partisans de Ptolémée étaient tenus, sous peine de renoncer à leur doctrine, d’affranchir les hypothèses astronomiques des conditions auxquelles les physiciens les avaient, en général, asservies.

Ptolémée attribue[1] à chacun des astres errants un orbe d’une certaine épaisseur, contigu aux orbes de l’astre qui le précède et de l’astre qui le suit. Entre les deux surfaces sphériques, concentriques au Monde, qui délimitent son orbe, la planète se meut ; son mouvement résulte des hypothèses nombreuses et compliquées qui ont été exposées en la Syntaxe. Comment doit-on concevoir l’accord de ces suppositions avec les principes de la Physique ? En d’autres termes, quelles conditions la Physique est-elle en droit d’imposer aux hypothèses de l’Astronomie ? C’est une question à laquelle Ptolémée, plus géomètre et astronome que philosophe, ne s’attarde guère. Il la touche cependant en un passage[2] dont le sens paraît singulièrement fort et précis, lorsqu’on le commente en le comparant à tout ce qui vient d’être dit. L’astronome qui cherche des hypothèses propres à sauver les mouvements apparents des astres ne connaît d’autre guide que la règle de la plus grande simplicité : « Il faut, du mieux qu’on le peut, adapter les hypothèses les plus simples aux mouvements célestes ; mais si elles ne suffisent pas, il faut en prendre d’autres qui conviennent mieux. » L’exacte représentation des mouvements célestes pourra contraindre l’astronome à compliquer graduellement ses suppositions ; mais la complexité du système auquel il se sera arrêté ne pourra être un motif de rejeter ce système s’il s’accorde exactement avec les observations : « En effet,

  1. Claude Ptolémée, Composition mathématique, livre IX, chapitre I ; éd. Halma, t. II, pp. 113-115.
  2. Claude Ptolémée, Composition mathématique, livre XIII, chap. II ; éd. Halma, t. II, pp. 374-375.