Page:Duhem - ΣΩΖΕΙΝ ΤΑ ΦΑΙΝΟΜΕΝΑ.djvu/49

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sont susceptibles d’une démonstration ; c’est ainsi, par exemple, qu’il est démontré que l’orbite du Soleil décline de l’équateur, et il n’y a pas de doute là-dessus. Mais que le Soleil ait une sphère excentrique ou un épicycle, c’est ce qui n’a pas été démontré et l’Astronomie ne se préoccupe pas de cela ; car le but de cette science est de poser un système par lequel le mouvement de l’astre puisse être uniforme, circulaire, sans être jamais hâté, ni retardé, ni changé de sens, et dont le résultat soit d’accord avec ce qui se voit. En outre, l'astronome se propose de diminuer autant que possible les mouvements et le nombre des sphères ; si, par exemple, nous pouvons poser un système selon lequel les mouvements visibles de tel astre se justifient au moyen de trois sphères, et un autre système selon lequel la même chose peut se justifier à l'aide de quatre sphères, le mieux est de s’en tenir au système suivant lequel le nombre des mouvements est le moindre. C’est pourquoi nous préférons, pour le Soleil, l’excentrique à l’épicycle, comme l’a dit Ptolémée. »

D’où vient cette impuissance où gît l’astronome à transformer ses hypothèses en vérités démontrées ? Elle a pour cause le caractère borné de la Science humaine, qui ne peut atteindre à la connaissance des choses célestes. Ptolémée l’a insinué, Proclus l’a dit avec plus de force et Maïmonide le répète[1] :

« Ce que j’ai déjà dit plus haut, je le répéterai ici : C’est que tout ce qu’Aristote a dit sur les choses sublunaires a une suite logique ; ce sont des choses dont la cause est connue et qui se déduisent les unes des autres, et la place qu’y tiennent la sagesse et la prévoyance de la Nature est évidente et manifeste. Quant à tout ce qui est dans le Ciel, l’homme n’en connaît rien si ce n’est ce peu de théories mathématiques ; et tu vois ce qu’il en est. Je dirai, en me servant d’une locution poétique : Les cieux appartiennent à l’Éternel, mais la terre, il l’a donnée aux fils d’Adam

  1. Maïmonide, Op. cit., deuxième partie, ch. XXIV ; trad. Munk, t. II, pp. 194-195.