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l’objet de la théorie physique

édifice unique, définitif et bien ordonné ; il semble plutôt qu’il élève un grand nombre de constructions provisoires et indépendantes, entre lesquelles les communications sont difficiles et parfois impossibles. »

« Prenons, comme exemple, le chapitre où l’on explique les attractions électrostatiques par des pressions et des tensions qui régneraient dans le milieu diélectrique. Ce chapitre pourrait être supprimé sans que le reste du volume en devînt moins clair et moins complet, et, d’un autre côté, il contient une théorie qui se suffit à elle-même, et on pourrait le comprendre sans avoir lu une seule des lignes qui précèdent ou qui suivent. Mais il n’est pas seulement indépendant du reste de l’ouvrage ; il est difficile à concilier[1] avec les idées fondamentales du livre, ainsi que le montrera plus loin une discussion approfondie. Maxwell ne tente même pas cette conciliation ; il se borne à dire[2] : I have not been able to make the next step, namely, to account by mechanical considerations for these stress in the dielectric. »

« Cet exemple suffira pour faire comprendre ma

  1. En réalité, cette théorie de Maxwell découle d’une mésintelligence complète des lois de l’élasticité ; nous avons mis cette mésintelligence en évidence et développé la théorie exacte qui devait être substituée aux erreurs de Maxwell (a) ; un terme, négligé à tort dans notre calcul, a été rétabli par M. Liénard (b), dont nous avons retrouvé les résultats par une analyse directe (c).

    (a) P. Duhem : Leçons sur l’Électricité et le Magnétisme, t. II, 1. XII. Paris, 1892.

    (b) Liénard : La Lumière électrique, t. LII, pp. 7, 67. 1894.

    (c) P. Duhem : American Journal of Mathematics, vol. XVII, p. 117, 1895.

  2. « Je n’ai pas réussi à faire le second pas, à rendre compte par des considérations mécaniques de ces tensions du diélectrique. » (Maxwell : Traité d’Électricité et de Magnétisme, traduction française, t. I, p. 174.)