Page:Duhem - La Théorie physique, 1906.djvu/17

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teur, timbre, figurent seulement à notre raison les caractères généraux de nos perceptions sonores ; elles lui font connaître le son tel qu’il est par rapport à nous, non tel qu’il est en lui-même, dans les corps sonores. Cette réalité, dont nos sensations ne sont que le dehors et que le voile, les théories acoustiques vont nous la faire connaître. Elles vont nous apprendre que là où nos perceptions saisissent seulement cette apparence que nous nommons le son il y a, en réalité, un mouvement périodique, très petit et très rapide ; que l’intensité et la hauteur ne sont que les aspects extérieurs de l’amplitude et de la fréquence de ce mouvement ; que le timbre est l’apparente manifestation de la structure réelle de ce mouvement, la sensation complexe qui résulte des divers mouvements pendulaires en lesquels on le peut disséquer ; les théories acoustiques sont donc des explications.

L’explication que les théories acoustiques donnent des lois expérimentales qui régissent les phénomènes sonores atteint la certitude ; les mouvements auxquels elles attribuent ces phénomènes, elles peuvent, dans un grand nombre de cas, nous les faire voir de nos yeux, nous les faire toucher du doigt.

Le plus souvent, la théorie physique ne peut atteindre ce degré de perfection ; elle ne peut se donner pour une explication certaine des apparences sensibles ; la réalité qu’elle proclame résider sous ces apparences, elle ne peut la rendre accessible à nos sens ; elle se contente alors de prouver que toutes nos perceptions se produisent comme si la réalité était ce qu’elle affirme ; une telle théorie est une explication hypothétique.

Prenons, par exemple, l’ensemble des phénomènes observés par le sens de la vue ; l’analyse rationnelle de