Page:Duhem - La Théorie physique, 1906.djvu/21

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légitime, c’est bien la Physique théorique ; car, de toutes les branches de connaissances, elle est assurément celle qui s’écarte le moins de l’Algèbre et de la Géométrie.

Or, mettre les théories physiques dans la dépendance de la Métaphysique, ce n’est certes pas le moyen de leur assurer le bénéfice du consentement universel. En effet, aucun philosophe, si confiant qu’il soit dans la valeur des méthodes qui servent à traiter des problèmes métaphysiques, ne saurait contester cette vérité de fait : Que l’on passe en revue tous les domaines où s’exerce l’activité intellectuelle de l’homme ; en aucun de ces domaines, les systèmes éclos à des époques différentes, ni les systèmes contemporains issus d’Écoles différentes, n’apparaîtront plus profondément distincts, plus durement séparés, plus violemment opposés, que dans le champ de la Métaphysique.

Si la Physique théorique est subordonnée à la Métaphysique, les divisions qui séparent les divers systèmes métaphysiques se prolongeront dans le domaine de la Physique. Une théorie physique, réputée satisfaisante par les sectateurs d’une École métaphysique, sera rejetée par les partisans d’une autre École.

Considérons, par exemple, la théorie des actions que l’aimant exerce sur le fer et supposons, pour un instant, que nous soyons péripatéticiens.

Que nous enseigne, au sujet de la nature réelle des corps, la Métaphysique d’Aristote ? Toute substance et, particulièrement, toute substance matérielle, résulte de l’union de deux éléments, l’un permanent, la matière, l’autre variable, la forme ; par la permanence de sa matière, le morceau de fer que j’ai sous les yeux