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la structure de la théorie physique

ment doit vérifier des équations qui, toutes, sont semblables aux équations qui régissent une vibration lumineuse.

Et non seulement ces équations ont la même forme, mais encore les coefficients qui y figurent ont la même valeur numérique. Ainsi, dans le vide ou dans l’air, d’abord soustrait à toute action électrique et dont on polarise une certaine région, la polarisation électrique engendrée se propage avec une certaine vitesse ; les équations de Maxwell permettent de déterminer cette vitesse par des procédés purement électriques, où aucun emprunt n’est fait à l’Optique ; des mesures nombreuses et concordantes nous font connaître la valeur de cette vitesse qui est de 300,000 kilomètres par seconde ; ce nombre est précisément égal à la vitesse de la lumière dans l’air ou dans le vide, vitesse que quatre méthodes purement optiques, distinctes les unes des autres, nous ont fait connaître.

De ce rapprochement inattendu la conclusion s’impose : L’éclairement n’est pas une qualité première ; la vibration lumineuse n’est autre chose qu’une polarisation diélectrique périodiquement variable ; la théorie électromagnétique de la lumière, créée par Maxwell, a résolu une propriété que l’on croyait irréductible ; elle l’a fait dériver d’une qualité avec laquelle, pendant de longues années, elle ne parut avoir aucun lien.

Ainsi les progrès mêmes des théories peuvent amener les physiciens à réduire le nombre des qualités qu’ils ont d’abord considérées comme premières, à prouver que deux propriétés regardées comme distinctes ne sont que deux aspects divers d’une même propriété.