Page:Duhem - La Théorie physique, 1906.djvu/345

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
335
la théorie physique et l’expérience

riences purement idéales ; pour lois expérimentales, des propositions dont les termes ne peuvent, sans contradiction, être pris comme exprimant des réalités. La Physique qu’il expose est une Physique faussée et falsifiée.

Que le professeur de Physique renonce donc à cette méthode inductive idéale, qui procède d’une idée fausse ; qu’il repousse cette manière de concevoir l’enseignement de la Science expérimentale, qui en dissimule et en torture le caractère essentiel. Si l’interprétation de la moindre expérience de Physique suppose l’emploi de tout un ensemble de théories, si la description même de cette expérience exige une foule d’expressions abstraites, symboliques, dont les théories seules fixent le sens et marquent la correspondance avec les faits, il faudra bien que le physicien se résolve à développer une longue chaîne d’hypothèses et de déductions avant de tenter la moindre comparaison entre l’édifice théorique et la réalité concrète ; encore devra-t-il bien souvent, en décrivant les expériences qui vérifient les théories déjà développées, anticiper sur les théories à venir. Il ne pourra, par exemple, tenter la moindre vérification expérimentale des principes de la Dynamique avant d’avoir non seulement développé l’enchaînement des propositions de la Mécanique générale, mais aussi jeté les bases de la Mécanique céleste ; encore devra-t-il, en rapportant les observations qui vérfient cet ensemble de théories, supposer connues les lois de l’Optique qui, seules, justifient l’emploi des instruments astronomiques.

Que le professeur développe donc, en premier lieu, les théories essentielles de la Science ; sans doute, en