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la structure de la théorie physique

après sa mort[1]. L’idée maîtresse de cet écrit est condensée en ce passage[2] : « Tout ce qui est terrestre se réunit au globe de la Terre ; de même, tout ce qui est homogène au Soleil tend vers le Soleil, toutes les choses lunaires vers la Lune, et de même pour les autres corps qui forment l’Univers. Chacune des parties d’un tel corps adhère à son tout et elle ne s’en détache point spontanément ; si elle en a été arrachée, non seulement elle s’efforce d’y revenir, mais elle est appelée et alléchée par les vertus du globe. S’il n’en était pas ainsi, si les parties pouvaient se séparer spontanément, si elles ne revenaient point à leur principe, le monde entier serait bientôt dissipé et dans la confusion. Il ne s’agit point d’un appétit qui porte les parties vers un certain lieu, un certain espace, un certain terme, mais d’une tendance vers le corps, vers la source commune, vers la mère d’où elles sont issues, vers leur principe, où toutes ces parties se trouveront unies, conservées, et où elles demeureront en repos, sauves de tout péril. »

La philosophie aimantiste de Gilbert fit, parmi les physiciens, de nombreux adeptes ; contentons-nous de citer François Bacon[3], dont les opinions sont le reflet confus des doctrines de son savant contemporain, et venons de suite au véritable créateur de la gravitation universelle, à Kepler.

  1. Gulielmi Gilberti Colcestrensis, medici Regii, De mundo nostro sublunari philosophia nova ; Opus posthumum, ab authoris fratre collectum pridem et dispositum. Amstelodami, MDGLI — Gilbert est mort en 1603.
  2. Gilbert : Loc. cit., p. 115.
  3. Bacon : Novum Organum, 1. II, c. xlviii, artt. 7, 8, 9.