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le choix des hypothèses

tromagnétisme. Cent quarante-trois ans ont séparé les De revolutionibus orbium cœlestium libri sex des Philosopliiæ naturalis principia mathematica ; moins de quatre ans séparent la publication de l’expérience d’Œrstedt de la mémorable lecture d’Ampère. Mais si le cadre de cet ouvrage nous permettait de conter par le détail l’histoire des doctrines électrodynamiques[1] au cours de ces quatre années, nous y retrouverions tous les caractères que nous avons rencontrés en l’évolution séculaire de la Mécanique céleste. Nous n’y verrions point le génie d’Ampère embrasser d’un coup d’œil un vaste domaine expérimental déjà constitué et, par une décision libre et créatrice, choisir le système d’hypothèses qui représentera ces données de l’observation. Nous y remarquerions les hésitations, les tâtonnements, le progrès graduel obtenu par une suite de retouches partielles, que nous avons notés durant les trois demi-siècles qui séparent Copernic de Newton. L’histoire de l’Électrodynamique ressemble fort à l’histoire de l’attraction universelle ; les multiples efforts, les tentatives réitérées qui constituent la trame de ces deux histoires se succèdent seulement en la première à intervalles beaucoup plus rapprochés qu’en la seconde, grâce à la prodigieuse fécondité d’Ampère, dont, pendant quatre ans, l’Académie des Sciences entend presque chaque mois une lecture ; grâce aussi à la pléiade de savants géomètres, de physiciens habiles, d’hommes de génie qui s’effor-

  1. Le lecteur désireux de constituer cette histoire trouvera tous les documents nécessaires dans les tomes II et III de la Collection de Mémoires relatifs à la Physique publiés par la Société française de Physique (Mémoires sur l’Électrodynamique, 1885 et 1887).