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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome II.djvu/111

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PHYSICIENS ET ASTRONOMES. — I. LES HELLÈNES

sent la continuité des sphères dans lesquelles se trouvent ces cercles ; ceux-ci, en effet, ils les meuvent d’un mouvement et celles-là d’un autre mouvement, indépendant du précédent ; ces cercles, ils ne les meuvent pas tous suivant une même loi, mais bien en des sens contraires les uns aux autres ; ils en enchevêtrent les distances de telle sorte que, tantôt, ils se rassemblent et viennent se placer dans un même plan, tantôt ils s’écartent et se coupent l’un l’autre. [S’il en est ainsi], les corps célestes subiront des coupures de toutes sortes, des refoulements de deux corps en un même lieu (συμπτύξεις) et des dislocations (διαϰρίσεις) ».

L’objection que Proclus adresse ainsi à ceux qui prétendent réaliser les excentriques et les épicycles de Ptolémée, nous l’avons déjà rencontrée, formulée par Sosigène ; nous verrons bientôt les Arabes, et particulièrement Averroès, s’en emparer pour combattre le système astronomique de l’Almageste.

Ces objections, d’ailleurs, ne sont pas les seules qu’on puisse adresser aux astronomes désireux de faire prendre pour des réalités les mécanismes qu’ils combinent. D’autre part, en effet, « la doctrine de ceux qui ont fabriqué de telles hypothèses paraît susceptible d’être mise sous des formes diverses — ϰαὶ ηύτοματισμένη φαίνεται τῶν μεμηχανημένων τούτων ὑποθέσεων ἡ παράδοσις. Chaque mouvement hypothétique possède soit un excentrique fixe ou mobile, soit un épicycle ». C’est cette ambiguïté d’hypothèses équivalentes qui, déjà, étonnait Hipparque ; son étrangeté n’échappe point à Proclus ; il en tire argument en faveur de la conclusion qu’il va formuler.

Les combinaisons de mouvements proposées par les astronomes sont de pures conceptions, dénuées de toute réalité ; elles n’ont pas à être justifiées à l’aide des principes de la Physique ; elles doivent seulement être disposées de telle sorte que les apparences soient sauvées. Les astronomes « ne concluent pas les conséquences à partir des hypothèses, comme on fait dans les autres sciences ; mais, prenant les conclusions pour point de départ, ils s’efforcent de construire des hypothèses d’où résultent nécessairement des effets conformes à ces conclusions, — Οὐϰ ἀπὸ τῶν ὑποθέσεων τὰ ἐξῆς συμπεραίνουσιν, ὡσπερ αἱ ἄλλαι ἐπιστήμαι, ἀλλ' ἀπὸ συμπερασμάτων τὰς ὐποθέσεις ἐξ ὦν ταῦτα δειϰνύναι ἔδει πλάττειν ἐγχειροῦσι. »

Hors la nécessité de sauver les apparences, un seul principe demeure imposé par Proclus à l’astronome qui invente des hypothèses ; ce principe, que Ptolémée admettait également, c’est la loi de la plus grande simplicité : « Toutefois, dit-il, il est à savoir