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PHYSICIENS ET ASTRONOMES. — II. LES SÉMITES

diamètre de la terre, comme ils ont exposé aussi toutes les distances et les grandeurs des astres, il a été prouvé que le centre de l’excentrique du Soleil est nécessairement hors de la concavité de la sphère de la Lune », et qu’il en est de même des centres des excentriques de Mars, de Jupiter et de Saturne.

D’autres raisons doivent faire rejeter les hypothèses des excentriques. Des orbes solides, immédiatement contigus les uns aux autres, et confinant les uns aux autres par des surfaces sphériques de centres différents, ne pourraient, tourner librement chacun autour du centre de sa surface convexe ; les orbes extérieurs entraîneraient dans leur mouvement les orbes intérieurs.

Thâbit ben Kourrah, pour parer à cette difficulté, a imaginé, entre chaque couple de sphères, un corps intermédiaire, un fluide susceptible de condensation et de raréfaction. « Mais[1] combien resterait-il là encore d’obscurités, s’il en était réellement ainsi ! Où supposerait-on le centre de ces corps qui existeraient entre chaque couple de sphères ? Et il faudrait que ces corps aussi eussent un mouvement particulier. »

Enfin, les variations d’inclinaison du plan de l’épicycle sur le plan de l’excentrique, telles que les décrit Ptolémée, sont des mouvements dont Maïmonide signale[2] l’invraisemblance à son disciple : « Je t’ai exposé de vive voix et montré qu’il est impossible de se figurer comment pareille chose peut exister dans les corps célestes. Ptolémée en a clairement avoué la difficulté.

» Je t’ai indiqué les endroits où tu peux vérifier tout ce que je t’ai dit, excepté cependant ce que je t’ai dit de l’observation touchant la place où tombent ces points qui sont les centres des excentriques ; car je n’ai jamais rencontré aucun autour qui s’en fût préoccupé. »

Sauf en ce point, en effet, la discussion à laquelle Moïse ben Maimoun a soumis le système des excentriques et des épicycles diffère peu de la critique qu’Ibn Rochd a faite de ce même système. Maïmonide, cependant, va-t-il conclure, comme Averroès, à la condamnation de l’Astronomie de Ptolémée ? Il connaît trop bien les raisons qu’on peut invoquer en faveur de cette Astronomie ; il sait combien le débat doit demeurer indécis entre les hypothèses sur lesquelles repose cette Astronomie et les principes de la Physique d’Aristote :

« Regarde[3], par conséquent, combien tout cela est obscur. Si

  1. Maïmonide, loc. cit., trad. Munk, t. II, p. 189.
  2. Maïmonide, loc. cit., trad. Munk, t. II, pp. 190-191.
  3. Maïmonide, loc. cit., trad. Munk, t. II, pp. 192-193.