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PHYSICIENS ET ASTRONOMES. — II. LES SÉMITES

et il l’a condamnée pour la même raison : « Si le mouvement contraire des planètes, dit-il[1], se faisait dans des cercles parallèles à l’équateur, c’est-à-dire autour des pôles du premier mouvement, il suffirait d’imaginer, pour toutes, un seul mouvement qui serait une conséquence du premier ; alors il paraîtrait vraisemblable que la différence entre la révolution des planètes et celle des étoiles vînt d’un simple retard, d’un moindre degré de vitesse, et non pas d’un mouvement réellement contraire. Mais en même temps qu’elles s’avancent vers l’Orient, les planètes s’approchent aussi de l’un ou de l’autre pôle d’une quantité qui n’est pas la même en tout temps ni pour toutes, en sorte que ces variations paraissent être causées par autant d’impulsions particulières. »

Dans son Commentaire au Timée de Platon, qui fut, croit-on, rédigé au début du ive siècle de notre ère, Chalcidius, inspiré peut-être par Théon de Smyrne, développe des pensées bien voisines de celles d’Alpetragius.

Il rappelle, tout d’abord[2], l’opposition qui existe entre l’Astronomie de Ptolémée et l’Astronomie des sphères homocentriques solides qui est celle d’Aristote. « Aristote, dit-il, repousse l’opinion selon laquelle il existe des excentriques et des épicycles ; il prétend, en effet, que les étoiles, qui sont des corps réels et solides, ne peuvent être portées par des cercles qui sont de simples lignes peintes en l’imagination. Comment, en effet, un corps pourrait-il être retenu par un lien incorporel ? »

Chalcidius expose ensuite, d’une manière sommaire, la marche d’une planète qui décrit son épicycle ; puis il poursuit en ces termes[3] :

« L’opinion des mathématiciens, toutefois, n’est pas conforme à celle des philosophes qui ne portent pas seulement leur attention sur ce qui se voit, mais aussi sur le mouvement naturel des étoiles. Ceux-ci affirment qu’aucune étoile ne se meut d’un mouvement contraire à la circulation générale de l’Univers, mais qu’elles tournent toutes dans le même sens, conformément à leur nature. » Un raisonnement peu clair, et peut-être tronqué par la négligence des copistes, le conduit à cette conclusion : « Les stations, les marches directes et rétrogrades qu’on observe s’expliquent

  1. Composition mathématique de Claude Ptolémée, traduite par M. Halma ; tome premier, Paris, 1813 ; livre I, c. VII, pp. 22-23 ; éd. Heiberg, Α′, η′ ; pars I, pp. 27-28.
  2. Chalcidii V. C. Commentarius in Timœum Platonis, LXXXIII (Fragmenta philosophorum grœcorum collegit F. G. A. Mullachius, voh II, p. 201. Parisiis, A. Firmin Didot, 1867).
  3. Chalcidii Op. laud., LXXXV ; édit. cit., p. 201.