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LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE

Cependant, cette hypothèse du neuvième orbe spécialement destiné au mouvement diurne pénétra de bonne heure dans la Science arabe. C’est elle, sans doute, qui inspire confusément Masciallah ; c’est elle qui se trouve clairement et formellement énoncée en divers traités de la vaste encyclopédie composée, au xe siècle de notre ère, par les Frères de la Pureté et de la Sincérité.

Rappelons, d’abord, que les Frères de la Pureté, selon leur propre témoignage[1], empruntent leurs connaissances astronomiques non seulement à l’Almageste, mais encore au petit traité d’Al Fergani. Cela fait, voyons ce que nos philosophes ont professé touchant le nombre des sphères célestes et le mouvement de l’orbe des étoiles fixes.

« Il y a, disent-ils en leur second traité[2], neuf sphères dont sept sont les cieux qui figurent dans le Coran. La première sphère et celle qui se rencontre tout d’abord [à partir de la Terre] est la sphère de la Lune… La huitième sphère céleste est celle des étoiles fixes ; elle entoure les sept cieux reconnus par le Coran, ; elle est le marchepied [de Dieu], qui embrasse les sept vieux et la terre. La neuvième sphère est la sphère enveloppante ; elle est le trône seigneurial, porté comme Dieu ledit : Huit anges soutiennent le trône de ton Seigneur. »

Plus loin, les Frères de la Pureté décrivent les mouvements de ces sphères[3], en suivant l’hypothèse qui regarde tous ces mouvements comme dirigés dans le même sens, de l’Orient vers l’Occident :

« La sphère enveloppante, qui est immédiatement mise en marche par la puissance motrice initiale, par l’Âme universelle, accomplit une révolution en 24 heures égales. Comme la sphère des étoiles fixes se trouvent à l’intérieur de la précédente, dont elle touche la lace interne, la sphère enveloppante l’entraîne avec elle dans le sens même où elle tourne ; mais le mouvement de la huitième sphère demeure, en vitesse, inférieure d’une petite quantité au mouvement de la sphère motrice, et la différence selon laquelle les parties de chacune de ces deux sphères cessent de se correspondre atteint un degré en cent ans…

  1. Fr. Dieterici, Die Lehre von der Weltseele bei den Arabern in X. Jahrhundert, Leipzig, 1872, p. 118 (Traduction allemande du trente-sixième traité de l’Encyclopédie composée par les Frères de la Pureté).
  2. Friedrich Dieterici, Die Philosophie der Araber im IX and X. Jahrhundert n. Chr. aus de Theologie des Aristoteles, den Abhandlungen Alfarabis und den Schriften den lautern Brüders Vtes Buch : Die Naturanschauung und Naturphilosophie. 2te Ausgabe, Leipzig, 1876 ; p. 26.
  3. Fr. Dieterici, Op. laud., pp. 35, 36 et 38.