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LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE

duisent les diverses apparences astronomiques ; ils écrivent à ce propos[1] :

« Les périodes millénaires se subdivisent en quatre sortes, qui sont les périodes de 7.000 ans, de 12.000 ans, de 31.000 ans et de 36.000 ans[2].

» Il y a des révolutions et des conjonctions qui s’accomplissent une seule fois en un temps très long, et d’autres, en un temps très court. Une très longue période est celle de la révolution des étoiles fixes sur le Zodiaque, car cette révolution s’accomplit une seule fois en 36.000 ans ; une période très courte est celle par laquelle, en 24 heures, la sphère enveloppante accomplit une révolution autour des éléments.

» Les autres périodes des conjonctions prennent place entre ces deux-là.

» La conjonction des étoiles au bout de 36.000 ans consiste en ceci que tous les astres errants, après avoir été réunis ensemble au premier degré du signe du Bélier, y reviennent tous ensemble au bout de ce laps de temps. Les tables du Sind et Hind, c’est-à-dire des Indiens, nomment ce laps de temps une année de la disposition du Monde. »

Le passage que nous venons de citer nous fournit des renseignements précieux, et de plus d’une sorte.

Il nous apprend, en premier lieu, que les Frères de la Pureté lisaient ce Sindhind dont Massoudi nous a parlé, ce Soûrya-Siddhânta où les anciennes doctrines des Indiens sur la vie périodique de l’Univers s’étaient précisées à l’aide de connaissances astronomiques fournies par de Ptolémée.

Il nous montre, en second lieu, quel dogme nos philosophes avaient tiré de cette lecture. Ils en avaient conclu l’identité de deux périodes astronomiques célèbres, qu’ils faisaient toutes deux égales à 36.000 ans. L’une de ces périodes est la Grande Année telle que les Chaldéens la concevaient au rapport de Bérose, le temps qui sépare deux conjonctions successives de tous les astres errants au point équinoxial du printemps. L’autre de ces périodes est la durée attribuée par Ptolémée à la révolution de l’orbe des étoiles fixes qu’Hipparque avait découverte. Identifiées entre elles, ces deux périodes constituent l’Année de l’Univers. Pourquoi ce nom ? Les Frères de la Pureté vont nous le dire.

  1. F. Dieterici, Die Lehre von der Weltseele bei den Arabern im X. Jahrhundert, Leipzig, 1872 ; p. 53.
  2. Dans tout ce passage, la traduction de F. Dieterici porte constamment 360.000 ans au lieu de 36.000 ans ; cette erreur est corrigée par la lecture de nombre d’autres passages du même ouvrage. Vide supra, pp. 208-209.