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LA PRÉCESSION DES ÉQUINOXES

un mouvement lent, qui parcourt en quatre-vingts ans ; qu’ils ont prétendu que ce mouvement se poursuivait dans le sens direct jusqu’à , et qu’il rétrogradait ensuite. Ils voulaient signifier par là que ce mouvement parcourait de l’Écliptique, de l’Occident vers l’Orient, comme le fait le mouvement des étoiles errantes[1] ; puis, qu’il décrivait de nouveau en un sens contraire du précédent, c’est-à-dire de l’Orient vers l’Occident. S’il en est ainsi, celui de ces deux mouvements qui va de l’Occident vers l’Orient doit procéder du mouvement des étoiles fixes ; mais cela ne peut se faire, à moins que [l’orbe des étoiles fixes] ne soit poussé par un autre corps ou que les étoiles fixes ne se meuvent elles-mêmes en cet orbe, car un même corps ne peut être simultanément doué de deux mouvements en sens opposés.

» Ces astrologues prétendaient donc que le mouvement progressif avait pris fin 128 années égyptiennes avant le règne d’Auguste, c’est-à-dire en l’an 166 de l’ère d’Alexandre de Macédoine ; à partir de cette année-là, il fallait, tous les 80 ans, retrancher un degré jusqu’à ce qu’on ait atteint la limite de  ; le reste devait être ajouté au mouvement direct des étoiles ; se trouvant de nouveau parcourus de la sorte, ce qui surpassait devait être ajouté à la longitude jusqu’à ce qu’on ait épuisé  ; puis on devait revenir à la précédente opération. »

On reconnaît sans peine, cil ce passage, non pas ce qui se lit au livre de Ptolémée, comme Al Battani le dit par une erreur évidente, mais ce que Théon d’Alexandrie nous a conté dans son Commentaire aux tables manuelles.

Al Battani remarque fort justement qu’une semblable hypothèse pouvait peut-être se défendre alors que les observations astrono-

  1. Le texte porte : « Comme le fait le mouvement des étoiles fixes. — Ut est motus stellarum fixarum. » Il nous semble qu’il y a là une erreur, et que cette erreur doit-être corrigée comme nous l’avons fait, si l’on veut donner un sens net au raisonnement qui suit. Delambre, conservant la leçon : ut est motus stellarum fixarum, croit qu’elle a trait au mouvement uniforme admis par Hipparque et par Ptolémée. « Théon nous avait laissé dans le doute si les auteurs qui croyaient un mouvement alternatif, admettaient pareillement un mouvement uniforme et constant, au lieu que l’auteur arabe nous dit que ce mouvement se combinait avec le mouvement uniforme de précession. C’est même la raison pour laquelle il le rejette, car dans la moitié du tems, les deux mouvemens se faisaient dans des sens contraires. Or Albategnius déclare positivement qu’un corps unique ne peut avoir, en même tems, deux mouvemens opposés » (Delambre, Histoire de l’Astronomie du Moyen-Âge, p. 54). Or Al Battani dit formellement que c’est « le premier mouvement, celui qui va de l’Occident vers l’Orient », qui est en sens contraire du mouvement des étoiles fixes ; par ce dernier, il entend donc le mouvement diurne, et non le mouvement d’Occident en Orient admis par Hipparque et Ptolémée. Il est vrai que son raisonnement conclut alors aussi bien contre ce dernier mouvement qu’à rencontre du mouvement d’accès et de recès.