Page:Duhem - Le Système du Monde, tome II.djvu/280

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
274
LA COSMOLOGIE HELLÉNIQUE

explicite au sujet de la doctrine de Séleucus, il nous enseigne[1] que cette doctrine admettait la rotation diurne de la terre, l’entraînement tourbillonnaire de l’air et, sur ce tourbillon aérien, une action perturbatrice de la Lune ; l’air, gêné dans son mouvement par cet astre, mettait, à son tour, la mer en branle. Cette explication, nous l’avons dit, faisait de Séleucus un précurseur de Descartes.


III
L’ÉCOLE STOÏCIENNE ET LES MARÉES. POSIDONIUS ET SES DISCIPLES

Les relations constatées par Pythéas, par Ératosthène, par Séleucus, entre le cours de la Lune et les mouvements de la mer ne pouvaient laisser indifférents les Stoïciens et, en particulier, Posidonius. Convaincus, en effet, que tous les changements produits au sein de la sphère sublunaire sont régis par les circulations des astres, les Stoïciens croyaient fermement à la possibilité de prévoir, à l’aide des observations célestes, le destin réservé aux êtres d’ici-bas. Or le principe qu’ils invoquaient pour justifier leur Astrologie semblait trouver, dans la régularité avec laquelle le flux et le reflux suivent le mouvement de la Lune, une preuve singulièrement frappante et convaincante.

Avant le siècle de Périclès, les Grecs ne semblent pas avoir connu la divination astrologique. La première allusion claire qu’ils aient faite à l’art de tirer des horoscopes paraît être celle qu’on lit au Timée de Platon.

Dans ce dialogue, Platon rappelait[2] comment, « à certaines époques, tel astre errant venait se placer entre tel autre astre et nous, et comment ces occultations, et les réapparitions qui les suivaient, causaient des terreurs et donnaient, à ceux qui sont capables de calculer, des signes des événements qui doivent arriver après ces phénomènes. — Φόϐους ϰαὶ σημεῖα τῶν μετὰ ταῦτα γενησομένων τοῖς δυναμένοις λογίζεσθαι πέμπουσι. »

Par le contact intime qu’elle établit entre le Monde hellénique et le Monde oriental, l’expédition d’Alexandre donna, sans doute, une forte impulsion au développement de l’Astrologie en Grèce. On y connut, dès lors, les pratiques des mages de Chaldée. Aux

  1. Stobæi Florilegium, éd. Meineke, t. IV, p. 220. — Voir : chapitre VII, VI ; t. I, pp. 423-424.
  2. Platon, Timée, 40 (Platonis Opera, éd. Didot, t. II, p. 211).