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LA THÉORIE DES MARÉES ET L’ASTROLOGIE

nous a été faite ne provient de rien d’autre que de l’agitation produite par le cours éternel des étoiles. Les étoiles, en effet, possèdent un sens qui leur est propre et une sagesse divine ; animées par une pure conception de la divinité, elles obéissent, d’un consentement sans fin, à ce Dieu suprême et directeur qui a combiné toutes choses selon les dispositions d’un loi perpétuelle, afin que l’ordre de la création éternelle soit sauvegardé.

» Aucun homme[1], en effet, n’est poussé par une témérité assez sacrilège et désespérée pour oser prétendre que la sagesse habite sur terre, où il ne voit que des choses mortelles ; pour qu’il aille déclarer, par suite de l’obstination violente de son esprit, que la sagesse, que la raison, que l’ordre providentiel ne résident pas là où tout s’orne d’une perpétuelle immortalité. Qui donc douterait que cette âme divine qui se trouve dans chacun des corps terrestres n’y fût infusée par les étoiles, en vertu d’une loi nécessaire ? C’est à l’orbe du Soleil qu’en est confiée la descente ; c’est l’orbe de la Lune qui en prépare l’ascension.

» L’Esprit divin, l’Âme céleste qui se trouve répandu dans la masse entière du Monde suivant une disposition concentrique, qui est placé partie à l’intérieur du Monde et partie à l’extérieur[2], dirige et dispose toutes choses par une agitation éternelle, qui est semblable à celle du feu ; cet Esprit entretient perpétuellement en lui le pouvoir de conserver et de créer toutes choses ; aucune fatigue ne lui fait interrompre cet office, en sorte que sa mobilité perpétuelle et inlassable soutient tout ce qui se trouve dans le Monde.

» Les feux éternels des étoiles, qui ont pris la figure de globes sphériques, c’est, cette Âme qui les pousse à parcourir, avec une hâte rapide, leurs cercles et leurs orbes. Animées par la majesté de cet Esprit divin, les étoiles transmettent aux corps terrestres une partie de cette Âme ; elles leur communiquent un esprit tiré des aliments que l’Âme du Monde leur fournit sans cesse.

» Telle est la raison pour laquelle une âme immortelle vient orner, en nous, la caduque fragilité de notre corps terrestre ; elle lui confie sa majesté, afin d’imiter par quelque côté l’Âme du Monde, son origine et son auteur ; celle-ci, en effet, diffusée parmi tous les êtres animés qui naissent de la conception terrestre, les anime d’un aliment divin et leur donne la force de se propager par une perpétuelle génération.

  1. La pensée que Julius Firmicus formule dans ce passage est, comme nous le verrons sous peu (au § XIII), une des pensées favorites de Galien.
  2. C’est, en effet, la doctrine de Platon ; voir : Ch. II, § XII ; t. I, pp. 90-91.