» Au contraire, si vous êtes étranger à cette planète, Jupiter aura horreur de vous, et vous n’atteindrez jamais au Monde suprême.
» Tous ceux, donc, qui ont dessein de contempler les essences supérieures doivent se comporter comme nous l’avons dit à l’égard du Seigneur des astres errants. »
Si les astres répandent des formes dans le monde sublunaire, s’ils y déterminent toutes les générations et toutes les destructions, c’est parce qu’ils ont, eux-mêines, reçu les formes émanées du Monde intelligible que l’Âme leur a infusées. Des transformations qui s’observent ici-bas, ils ne sont donc que causes secondes ; mais ils en sont, cependant, très réellement causes efficientes. Dès lors, se pose cette difficile question : Comment les étoiles peuvent-elles, à la fois, être des substances parfaitement bonnes et produire tous les maux que ce bas monde étale à nos yeux ? Cette objection avait grandement préoccupé Plotin ; elle l’avait conduit à refuser aux astres la qualité de causes pour ne leur laisser jouer que le rôle de signes. Or l’auteur de la Théologie d’Aristote a lu les Ennéades, dont il imite de très près certains chapitres ; il ne peut donc se dispenser d’examiner ce problème : Comment des astres bons sont-ils causes du mal ?
Il commence[1] par rejeter la solution de Plotin : « Certains diront-ils que les étoiles sont signes des événements terrestres ? Si, dans leur pensée, ils entendent par signe un moyen qui sert à l’accomplissement de l’œuvre, nous répondrons qu’ils disent vrai. Souvent, en effet, nous prouvons une première chose par ce qui en est la suite ; nous prouvons, par exemple, la cause par l’effet ou l’élément simple par le composé ; mais parfois, aussi, nous connaissons les accidents par leur principe, le composé par l’élément simple ». Si donc les astres nous permettent de prévoir les événements du monde sublunaire, s’ils en sont signes, c’est simplement parce qu’ils en sont causes, et que la connaissance des causes permet de connaître les effets.
Mais alors se pose, inévitable, cette question : « Les étoiles sont-elles causes des maux qui arrivent ici-bas ? Non, déclarerons-nous, car leur action n’est pas volontaire ; elles sont, en effet, au-dessus de la volonté. Tout agent qui fait le bien et le mal est un agent volontaire ; au contraire, tout agent qui est supérieur a la volonté ne fait que le bien. C’est d’une manière nécessaire que les dispositions du monde inférieur proviennent du monde supé-
- ↑ Aristotelis Theologia, lib. VI, cap. I ; éd. 1519, fol. 27, vo, et fol. 28, ro ; éd. 1572, fol. 49, ro et vo.