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LES DIMENSIONS DU MONDE

c’est elle qui a ôté presque toute valeur pratique à la géniale conception théorique d’Aristarque de Samos.

Cette conception d’Aristarque est encore celle qui a guidé en très grande partie, nous venons de le voir, les raisonnements d’Hipparque et de Ptolémée ; mais, pour Ptolémée, l’évaluation de la parallaxe lunaire a remplacé la détermination, que le Géomètre samien était tenu de faire, de la position du Soleil au moment de la dichotomie.


V
LES ORBES CÉLESTES ET LES DISTANCES DES ASTRES À LA TERRE

Ératosthène avait donné aux humains une méthode propre à déterminer les dimensions de la Terre qui les porte, et il avait, le premier, appliqué cette méthode. Aristarque de Samos leur avait montré comment on pouvait connaître la distance qui nous séparent du Soleil et de la Lune, et mesurer les grandeurs de ces astres. Ces belles découvertes, en montrant à la curiosité des hommes tout ce dont la science astronomique était capable, inspiraient à cette curiosité une nouvelle ardeur et lui faisait désirer de connaître plus encore. Ces astres errants, Mercure, Vénus, Mars, Jupiter, Saturne, ces étoiles fixes, quelles distances les séparent de nous ? Quelle est la grosseur de chacun d’eux ? La Syntaxe mathématique de Claude Ptolémée ne donnait aucune réponse à cette question. Pour satisfaire à l’impatience de ceux qui la posaient aux Astronomes, une théorie fut proposée ; longtemps, elle fut admise comme aussi sûre que les doctrines d’Ératosthène et d’Aristarque, dont elle semblait être le couronnement.

Pour saisir le premier germe de cette doctrine, il nous faut remonter, dans le passé, jusqu’au temps où s’ébauchait la théorie des planètes fondées sur la considération des épicycles.

Dans l’ouvrage où Théon de Smyrne nous a conservé l’enseignement d’Adraste d’Aphrodisias et des physiciens qui avaient succédé à Hipparque, nous voyons cette théorie s’ébaucher, gardant encore, dans sa forme première, les traces bien visibles de la doctrine dont elle est issue, de la théorie des sphères homocentriques.

Le mouvement des divers astres errants imite le mouvement qu’Hipparque a attribué au Soleil ; la planète parcourt un cercle épicycle dont le centre décrit lui-même un cercle concentrique au