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LA COSMOLOGIE DES PÈRES DE L’ÉGLISE


que, et quand il convient de la hâler sur le rivage ; ils savent quand il faut larguer la voile ou la carguer… Nous-mêmes, en voyant une comète ou étoile chevelue, ou bien un parhélie, nous prévoyons soit une incursion des ennemis, soit une invasion de sauterelles, soit une grande mortalité des bestiaux ou des hommes. »

Théodoret, évidemment, accorde à l’Astrologie tout ce que la loi ne le contraint pas strictement de refuser. Saint Augustin, nous le verrons, se montrait moins large à l’égard de la Science des Chaldéens.

D’ailleurs, peu soucieux de pénétrer dans le détail des recherches des astronomes, l’Évêque d’Hippone et avec lui, sans doute, la plupart des docteurs de l’Église, ne savaient pas séparer, d’une manière précise, les hypothèses des physiciens des superstitions des astrologues ; les premières se trouvaient confondues dans la réprobation qui frappait les secondes.

Saint Augustin, par exemple, vient de rappeler comment certains astronomes expliquent la rétrogradation des planètes inférieures par une attraction que les rayons du Soleil exerceraient sur ces planètes. Il ajoute tout aussitôt[1]  : « Mais, peut-être, tout le monde n’accordera-t-il pas que la marche rétrograde ou lente de ces planètes soit due à l’action du Soleil ; peut-être l’attribuera-t-on à des causes plus cachées. Il est certain toutefois, et manifeste par la lecture de leurs livres, que ces gens, dans les élucubrations délirantes par lesquelles, hors de toute vérité, ils prétendent conjecturer le pouvoir des sorts, attribuent au Soleil la principale puissance.

» Mais qu’ils disent tout ce qu’ils voudront du ciel, ceux qui ignorent le Père qui est aux cieux. Pour nous, nous livrer à de plus subtiles recherches sur les grandeurs des astres et les intervalles qui nous en séparent, employer à cette étude le temps que réclament des sujets meilleurs et plus importants, cela ne nous paraît ni utile ni convenable. »

Ne cherchons donc pas, dans les écrits des Pères de l’Église, les traces d’une Science bien minutieuse et bien raffinée ; ces traces, nous sommes assurés de ne les y point trouver.

Ne négligeons pas, cependant, le peu qu’ils ont dit de la Physique et de l’Astronomie.

Tout d’abord, leurs enseignements à ce sujet sont le germe pre-

  1. S. Augustini De Genesi ad litteram liber secundus, Cap. XVI, 33-34 ; éd. cit., col. 277.