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LES DIMENSIONS DU MONDE

étoiles qui sont, plus que les autres, voisines de la Terre de telle sorte que cet espace intermédiaire se trouve exactement rempli par elles seules [c’est-à-dire par leurs orbes]. »

Lorsque Proclus écrit : « Ptolémée conclut en de semblables termes que le Soleil est l’astre du milieu parmi les astres errants », il ne semble pas qu’il ait l’intention d’attribuer à Ptolémée le calcul des distances de Vénus et de Mercure qu’il a développé, mais seulement le principe que suppose ce calcul et qu’il vient de rappeler en dernier lieu : « Il ne peut y avoir d’espace vide, δεῖ δὲ οὐδὲν εἶναι ϰενόν ». Et ce principe est bien celui que Ptolémée invoque aux Hypothèses pour démontrer que Mercure et Vénus sont au-dessous du Soleil.

Proclus n’attribue donc pas à Ptolémée le calcul des distances des diverses planètes à Terre. Seul, Simplicius avance que ce calcul se trouvait dans la Syntaxe. Peut-être, disions-nous, l’ouvrage, d’auteur inconnu, où ce calcul était donné, se trouvait-il, au temps où il écrivait, adjoint à la Syntaxe et attribué a Ptolémée.

Il semble que cet ouvrage, ou un ouvrage semblable, ait circulé, dans l’Antiquité, sous le nom d’Archimède : c’est, du moins, la supposition que suggère la lecture de Macrobe ; voici, en effet, ce qu’écrit cet auteur[1] :

« Archimède a pensé qu’il avait réussi à déterminer le nombre des stades qui séparent la Lune de la surface terrestre, de ceux qui séparent Mercure de la Lune, Vénus de Mercure, le Soleil de Vénus, Mars du Soleil, Jupiter de Mars, Saturne de Jupiter ; il a jugé également qu’il avait mesuré par le calcul tout l’espace qui s’étend de l’orbe de Saturne au ciel des étoiles fixes. Mais les Platoniciens ont rejeté cette évaluation d’Archimède, comme ne gardant pas des intervalles doubles ou triples les uns des autres. »

L’existence d’un tel livre sur la distance des planètes et son attribution à Ptolémée sont mentionnées, à deux reprises, par le célèbre astronome Albyrouny.

Dans son important ouvrage sur l’Inde, Albyrouny rapporte[2] qu’en l’an 161 de l’hégire (777-778 après J.-C.), Iacoub ben Tariq avait tiré d’écrits indiens une théorie sur la distance des divers astres

  1. Theodosii Ambrosii Macrobii Commentarius ex Cicerone in somnium Scipionis ; lib. II. cap. III.
  2. Al Biruni, India, Arabic text edited by Ed. Sachau, London, 1887, cap. LV, pp. 234-236. English edition by Ed. Sachau, London, 1888, t. II, pp. 68-69. — Nos renseignements sur Albyrouny sont empruntés à une note de M. Nallino, dans son édition de : Al Battani Opus astronomicum, pars prima, Mediolani, 1903, pp. 287-288.