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PHYSICIENS ET ASTRONOMES. — I. LES HELLÈNES

bien que Le système des sphères homocentriques d’Eudoxe, de Calippe et d’Aristote.


III
LES OPINIONS DE PTOLÉMÉE SUR LA VALEUR DES HYPOTHÈSES ASTRONOMIQUES.
A. La Grande syntaxe mathématique

Les progrès de l’Astronomie rendirent bientôt intenable la position prise par Adraste et par Théon. Du jour où Ptolémée, pour représenter les inégalités du mouvement planétaire, fit porter chaque planète par un épicycle dont le centre, au lieu de demeurer toujours à égale distance du centre de l’Univers, décrivait un cercle excentrique au Monde, l’agencement de sphères imaginé par Adraste d’Aphrodisias et par Théon de Smyrne devint incapable de représenter une telle marche. Cette incapacité crût à chacune des complications que Ptolémée fut contraint d’apporter, afin que les phénomènes fussent sauvés, aux hypothèses primitives d’Hipparque. Assurément, un péripatéticien ne pouvait déclarer les hypothèses de la Syntaxe conformes aux principes de sa Physique, car elles ne réduisaient pas tous les mouvements célestes à des révolutions homocentriques ; mais un disciple d’Adraste et de Théon ne pouvait davantage les regarder comme physiquement recevables, car aucun tourneur, semble-t-il, n’en pouvait construire une représentation faite de bois ou de métal. Il est donc clair que les partisans de Ptolémée étaient tenus, sous peine de renoncer à leur doctrine, d’affranchir les hypothèses astronomiques des conditions auxquelles les Physiciens les avaient, en général, asservies.

Ptolémée attribue[1] à chacun des astres errants un orbe d’une certaine épaisseur, contigu aux orbes de l’astre qui le précède et de l’astre qui le suit. Entre les deux surfaces sphériques, concentriques au Monde, qui délimitent sa sphère, la planète se meut ; son mouvement résulte des hypothèses nombreuses et compliquées qui ont été exposées dans la Syntaxe. Comment doit-on concevoir l’accord de ces suppositions avec les principes de la Physique ? En d’autres termes, quelles conditions la Physique est-elle en droit d’imposer aux hypothèses de l’Astronomie ? À cette

  1. Claude Ptolémée, Composition mathématique, livre IX, ch, I ; éd. Halma, t. II, pp. 113-115 ; éd. Heiberg, Θ’, α’ ; pars II, pp. 206-207.