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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome III.djvu/145

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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


écrivait Pline, la planète est frappée par le rayon du Soleil qui l’empêche de poursuivre sa marche directe ; la force ignée l’élève en haut ; cela, notre vue ne le peut comprendre immédiatement ; aussi jugeons-nous que la planète s’arrête ; d’où le nom de station donné à cet effet ; puis la violence de ce même rayon continue de progresser, et la vapeur, repoussant la planète, la contraint à la marche rétrograde. »

Chalcidius se borne à nous dire [1] qu’au gré de certains auteurs, si, tantôt, le Soleil dépasse Vénus et Mercure et, tantôt, se laisse dépasser par ces astres, c’est parce que ces planètes ont une force contraire, vis contraria ; c’est traduire en Latin le nom de l’ἐναντία δύναμις que leur attribue Platon ; ce n’est pas en dévoiler la nature.

Au temps de Saint Augustin, l’opinion qu’exprimaient les vers de Lucain trouvait, parmi les philosophes, de nombreux partisans. Les Néo-platoniciens astrolâtres y voyaient une preuve de la prédominance qu’ils attribuaient au Soleil sur tous les autres dieux stellaires. C’est contre eux que l’Évêque d’Hippone raisonne en ces termes [2] :

« Ils posent habituellement cette question : Ces luminaires éclatants du Ciel, le Soleil, la Lune et les étoiles, ne seraient-ils pas tous doués d’une égale splendeur ? Mais, à nos yeux, ne sembleraient-ils pas doués d’une clarté plus ou moins grande selon qu’ils sont plus ou moins voisins de la terre ?… Ils ne craignent pas de dire que beaucoup d’étoiles sont égales au Soleil, voire même plus grandes, mais qu’elles semblent petites parce qu elles sont plus éloignées que cet astre…

» Certains astres seraient donc plus grands que le Soleil même. Qu’ils examinent alors de quelle façon il est possible d’attribuer, à ce dernier, une si grande domination qu’il ait, par la violence de ses rayons, pouvoir non seulement de retenir, mais de faire rétrograder, contre leur marche propre, certaines étoiles ; je dis des étoiles principales, de celles qui, dans leurs prières, prennent rang avant les autres. Il n’est pas vraisemblable, en effet, que le Soleil puisse, par la violence de ses rayons, maîtriser des étoiles qui sont plus grandes que lui ou même des étoiles qui lui sont égales.

1. Chalcidii Commentarius in Timœum Plaioriis^ GVIII (Fragmenta Phàlosophorum grœcorum. Collegit Fr. G. A. Mullachius, vol. Il, p. 206 ; Parisiis, A. Firmin Didot, 1867).

2. S. Aurelii Augustini De Genesi ad litteram cap. XVI, 33. [S. Aurelii Augustini Opéra. Accurante J. P. Migne. T. III (Patrologice Latinœ, t. XXXIV) col, 277].

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