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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


l’on nomme Azarchel ou Albaténi, avait semblablement composé un livre des cours des astres, daté en années arabes et calculé pour Tolède ; cette ville est, [en longitude], distante de notre cité, c’est-à-dire de Marseille, d’une heure et un dixième d’heure. Dès lors, nous avons cru que ce ne serait pas œuvre indigne de dresser notre livre au moyen des années comptées depuis le Seigneur Jésus-Christ et du méridien de la susdite cité.

» Puisque nous avions été les premiers des Latins à qui cette science fût parvenue après avoir été traduite de l’Arabe (Et quia nos primi Latinorum fueramus ad quos, post Arabum translationem, hæc scientia percenerat…), il ne semblait pas absurde que notre travail fût de quelque utilité pour certains Latins. Nous nous sommes donc mis à la présente œuvre, et nous avons transformé le susdit livre de Tolède en celui-ci (atque prædictum Toletanum in eo immutati sumus).

» Nous avons constitué les racines[1] des sept planètes et de la tête du Dragon sur l’heure de minuit après le septième jour de fête des calendes de janvier, jour où a commencé l’année des Latins en laquelle le Seigneur s’est incarné ; nous les avons constituées sur [le méridien de] Marseille dont la distance [en longitude] à la ville d’Arin, dont la longitude et la latitude sont également nulles, est de trois heures.

» Il faut remarquer qu’en ce livre, nous faisons commencer l’année aux calendes de Janvier ; ainsi, bien que ce livre soit fondé sur l’emploi des années comptées depuis l’incarnation du Seigneur, nous ne commençons pas à partir du jour même où le Seigneur s’est incarné ; ce n’est pas à ce jour-là que nous avons fixé les racines de nos tables, mais quatre-vingt-quatre jours auparavant, temps qui s’est écoulé entre les calendes de Janvier jusqu’au 8 des calendes d’Avril, jour où nous croyons que le Seigneur s’est incarné. C’est de Janvier, en effet, que l’année des Latins prend son commencement. »

Ce préambule aux canons composés par notre astronome de Marseille était précédé d’une table[2] des « auges fixes, qu’on nomme auges d’Albaténi ». Cette table faisait connaître les positions des apogées des déférents des planètes rapportées à la sphère des étoiles fixes, positions qui demeurent toutes invariables dans la suite des temps selon le système d’Al Battani, tandis que, selon Al Zarkali, l’auge du Soleil se déplace par rapport aux étoiles fixes.

  1. Radices, le point de départ des tables.
  2. Ms. cit., fol. 116, col. a.