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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome III.djvu/34

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L’INITIATION DES BARBARES

tionnelle depuis l’incarnation de J.-C. (c’est-à-dire le numéro d’ordre depuis l’origine admise par notre auteur, diminué d’une unité) qui doit figurer dans le calcul dont il trace la règle ; c’est ce numéro diminué d’une unité ; la première période indictionnelle depuis l’incarnation, qui est la seconde depuis l’origine des indictions, a, en effet, commencé avec l’an XIII.

Si l’on fait le calcul prescrit par l’auteur, selon que l’on prend le nombre 60 ou le nombre 70 pour le multiplier par 15, l’opération indiquée donne 912 ou 1062. En faisant subir à cette opération la correction que nous venons de signaler, on trouverait 897 ou 1047. En aucun cas on ne trouverait ni le nombre 1020, ni le nombre 1120.

Roger Wilmans a proposé[1] une interprétation de ce calcul ; il a trouvé qu’on le rendait exact en mettant le nombre 74 au lieu du nombre 70 ou du nombre 60, et le nombre 1122 au lieu du nombre 1120. Il en conclu que le De Imagine mundi avait été rédigé entre 1122 et 1137. Mais est-il permis de regarder comme légitime une correction aussi arbitraire ? Ne vaut-il pas mieux reconnaître simplement que le passage considéré est trop corrompu, trop variable d’une leçon à l’autre, pour que nous puissions en tirer la date de composition du De imagine mundi ?

Dans beaucoup d’éditions, cet écrit se compose seulement de deux livres ; c’est ce qui a lieu, notamment, dans l’édition princeps des Opuscula de Saint Anselme. Dans d’autres éditions, dans celle, notamment, qu’a reproduite la Patrologie de Migne, un troisième livre y est joint, qui développe une chronologie universelle ; cette chronologie se termine par la durée des règnes de Lothaire II et de Conra III ; des additions ultérieures l’ont prolongée. Si l’on observe que Conra III est mort en 1152, on serait amené à reporter après cette date la composition du De imagine mundi.

Mais il est infiniment probable que l’auteur du De imagine mundi avait rédigé seulement les deux premiers livres ; le troisième livre y aura été joint, après coup, par quelque autre écrivain ; le début même de ce troisième livre semble justifier cette supposition : « Il ne me paraît pas infructueux d’insérer dans cet ouvrage la série des temps écoulés… », dit le chronologiste.

Pour choisir, donc, entre les auteurs supposés du De imagine mundi, il nous faut renoncer au secours d’une date précise.

Il semble que l’attribution de cet ouvrage à Saint Anselme soit chose peu vraisemblable, et voici pourquoi.

  1. Rogerus Wilmans, Proœmium ad Honorium (Monum. Germ. hist., X, p. 125, nota 9) — Cf. : Patrol., col. 161, en note.