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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome III.djvu/358

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L’ASTRONOMIE DES DOMINICAINS


Nous ne nous étonnerons donc pas qu’il s’en inspire en sa théorie des mouvements célestes.

Selon lui, deux sortes de natures doivent être distinguées dans cet Univers ; d’une part, sont des êtres qui ont, en apanage, la perpétuité, et ce sont les substances séparées ; d’autre part, sont des êtres susceptibles de génération et de corruption, et ce sont les quatre éléments.

Les substances célestes sont intermédiaires entre ces deux catégories ; elles participent de la nature des substances permanentes, comme de la nature des substances engendrables et corruptibles ; et chacune de ces participations se fait par un certain mouvement.

Les corps célestes sont donc animés de deux mouvements. L’un de ces mouvements est un principe d’éternelle durée ; c’est un mouvement de rotation uniforme, d’Orient en Occident, autour des pôles du Monde. L’autre mouvement est une cause de génération, de corruption et de transformations ; c’est une rotation uniforme, d’Occident en Orient, autour d’une normale à l’écliptique.

Au premier mouvement, toutes les orbites célestes prennent également part ; toutes accomplissent, en un même jour, leur révolution d’Orient en Occident.

Au second mouvement, au contraire, les diverses orbites prennent part à des degrés inégaux, d’autant moins qu’elles sont plus nobles. Le neuvième ciel, qui est le plus proche des substances séparées et le premier en excellence, est absolument exempt de ce mouvement. Une rotation d’Occident en Orient, très lente à la vérité, entraîne déjà la sphère des étoiles fixes. Cette rotation s’accélère au fur et à mesure qu’on descend d’orbite en orbite pour se rapprocher de l’ensemble des éléments susceptibles de génération et de corruption.

Il n’est pas nécessaire, d’ailleurs, que la rapidité de ces mouvements rétrogrades croisse suivant une progression régulière, comme l’avait soutenu Albert le Grand ; les mouvements des orbites célestes, en effet, ne sont pas seulement naturels ; ils sont encore volontaires.

Cette doctrine, Saint Thomas d’Aquin la regarde assurément comme le principe qui domine toute l’Astronomie ; à l’énoncé de ce principe se réduit presque tout ce que la Somme théologique dit de la Science des astres.

Dans cet ouvrage, Saint Thomas d’Aquin regarde comme dou-

    rédigés par Saint-Thomas lui-même ; certains auteurs les attribuent à son disciple Pierre d’Auvergne.