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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome III.djvu/41

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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE


qu’il prépara ultérieurement pour l’évêque Jacques de Metz, les traces si marquées de son passage en Syrie et en Sicile. Rien, en effet, n’empêche de croire que la seconde rédaction soit postérieure à la croisade d’Égypte. La troisième rédaction, celle du manuscrit de Harley, est postérieure aux deux autres, puisqu’elle les mentionne, mais il n’y a aucun moyen d’en déterminer la date. »

« L’Image du Monde a eu un succès immense [1].

» L’ouvrage de Gossuin, sous sa première forme qui, dédiée à un fils de France, fut, assez naturellement, plus répandue que l’édition messine — a été « desrimé » à la fin du xiiie siècle ou au commencement du {s|xiv|e|-}} ; de là, la rédaction en prose, dont il y avait un magnifique exemplaire, ayant appartenu à Guillaume Flotte, seigneur de Revel, chancelier de France, dans la Bibliothèque de Jean, duc de Berry. Il a été traduit en hébreu, en judéo-allemand, en anglais, et plusieurs fois imprimé au XVe siècle. En 1517, un nommé François Buffereau, de Vendôme, serviteur de la famille de Gingins, publia à Genève un Mirouer du Monde dont il. s’attribua froidement la composition ; ce n’est autre chose que le livre du clerc messin, dont le plagiaire s’est contenté de rajeunir la langue. Bref, l’Image du monde a été lue pendant près de trois cents ans par les laïcs intelligents, curieux de la Philosophie naturelle.

» La vogue de l’Image s’est traduite encore d’une autre façon ; on l’a beaucoup imitée ; la plupart des émules de Gossuin ont eü ses écrits sous les yeux. Que Brunet Latin l’ait lue ou non pour son Trésor, Matfre Ermengau, de Béziers, s’en est inspiré pour nourrir son Breviari d’Amor, qui est daté de 1288. Il a été signalé depuis longtemps que la partie astronomique du poème lorrain fut démarquée au xive siècle « dans la seconde rédaction dii Renard contrefait, qui date au plus tôt de 1342 ».

Le Solitaire qui adressait l’Imago mundi à son ami Christianus ne s’attendait assurément pas à ce qüe son œuvre eût une pareille fortune.

  1. Ch.-V. Langlois, Op. laud., pp. 65-66.