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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome III.djvu/434

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L’ASTRONOMIE DES FRANCISCAINS


des canons, composé des tables pour vérifier si les apparences célestes sont conformes à l’opinion de Ptolémée ; comme divers astronomes, tels qu’Albatégni, Thébith et Arzachel, ont ajouté aux observations de Ptolémée des observations nouvelles, en vue de déterminer le mouvement du ciel des étoiles fixes et des auges des planètes ; comme ils ont exposé la théorie de Ptolémée et complété ce qui y faisait défaut, je veux, en un bref discours, résumer la position de Ptolémée et donner une succiute exposition de ce que les autres y ont ajouté. »

Aucune conclusion ne termine l’exposition que nous venons de résumer ; et, semble-t-il, il est juste qu’il en soit ainsi ; l’auteur veut laisser son lecteur en suspens comme il y demeure lui-même.

D’une part, Bacon est physicien ; comme tel, il admet que l’Astronomie doit reposer sur les principes de la saine Physique, et, pour lui comme pour Averroès, la saine Physique, c’est la Physique d’Aristote ; il n’est donc pas possible de donner son adhésion aux hypothèses des mathématiciens purs qui, comme Ptolémée, ignorent la Physique, car ces hypothèses contredisent aux principes de la Physique ; il ne faut pas hésiter à recevoir les fondements essentiels des doctrines d’Averroès et d’Al Bitrogi, et cela en dépit des contradictions qu’opposent les phénomènes à ces doctrines ; il vaut mieux se fier à la raison des philosophes qu’au témoignage des sens, qui peut nous tromper ; qui sait, d’ailleurs, si la découverte de quelque mouvement céleste, inconnu jusqu’ici, ne viendra pas faire évanouir toutes ces difficultés ?

Mais, d’autre part, Bacon est astronome et astrologue ; il a souci des observations cjui se font à l’aide des instruments ; il lui faut donc des canons et des tables qui lui permettent de calculer d’avance la position des divers astres à un instant donné. Or, l’Astronomie d’Al Bitrogi n’a pas été réduite, jusqu’ici, en canons et en tables ; seul le système de Ptolémée a été conduit jusqu’à ce degré de perfection où il est possible de prévoir les observations et de constater si elles sont conformes aux prévisions. Bacon usera donc du système de Ptolémée, mais sans croire à l’exactitude des hypothèses qui le portent ; il en usera provisoirement, en attendant le jour où, à l’aide des principes d’Al Bitrogi, on aura construit des canons et des tables adaptés aux observations.

Bacon a promis d’exposer ce que les successeurs de Ptolémée ont ajouté à l’œuvre de cet astronome ; c’est ce qu’il fait au XIXe chapitre de la cinquième partie du livre De cælestibus, qui est le dernier du texte manuscrit conservé à la Bibliothèque Maza-