c’est là, en effet, le milieu du Monde entre les deux pôles ; c’est
le véritable Occident.» Il nous apprend enfin que « de cette façon,
la longitude de Tolède, comptée à partir de i’Occident, est 29°. »
L’auteur de nos canons, qui donne à Tolède 28° et demi de longitude orientale, a donc choisi l’origine des longitudes de cette façon que Bacon jugeait la plus exacte et la meilleure ; et lorsqu’il donne à cette origine le nom de Gades Herculis in Occidente positi, ce n’est pas la ville de Cadix qu’il entend désigner par là, mais les deux colonnes qu’Hercule, suivant une tradition communément acceptée au Moyen Age, avait élevées aux confins de la terre habitée.
En choisissant l’exemple de la ville de Londres pour montrer comment le moyen mouvement du Soleil, calculé par les Tables de Tolède, se trouve également déterminé pour une autre ville, l’auteur des canons nous laisse supposer qu’il les destine à quelque habitant de Londres.
Ce pourrait être une objection à l’encontre de ce que nous avons supposé de cet auteur et de ce destinataire. C’est à Paris, en effet, que Roger Bacon a connu et instruit son disciple Jean. Mais ne peut-on supposer qu’au retour de son voyage à Rome, où il avait remis au pape l’Opus majus et le De multiplicatione specierum, Jean eût quitté Paris pour Londres ? Jean pouvait bien être un étudiant anglais que le désir de s’instruire avait, comme tant de ses compatriotes, conduit vers la grande université parisienne, alors souveraine dispensatrice de la Science, et qui avait ensuite remporté dans sa patrie le trésor des connaissances acquises. Bacon, dans sa jeunesse, n’avait pas autrement agi. Et peut-être est-ce parce que Jean n’était plus à Paris, auprès de lui, parce qu’il ne pouvait pas lui enseigner oralement la pratique des calculs astronomiques, qu’il avait composé, à son usage, des canons sur les Tables de Tolède.
L’ordre et la clarté avec lesquels ces canons sont rédigés les rendent dignes des autres écrits où Bacon a traité des théories astronomiques. Une particularité les distingue de la plupart des canons dressés par d’autres auteurs ; ceux-ci se contentent, en général, de tracer la règle qu’on doit suivre pour tirer parti des tables, sans examiner les principes qui ont servi à construire ces tables et qui justifient ces règles ; au contraire, dans l’ouvrage que nous avons sous les yeux, chaque canon est précédé ou accompagné de considérations astronomiques qui l’expliquent ; on pourrait, de cet ouvrage, extraire une véritable Théorie des planètes, où l’étude du mouvement de la huitième sphère ferait seule défaut.