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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome III.djvu/520

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L’ASTRONOMIE DES FRANCISCAINS

« Les rayons incidents qui tombent sur un trou plan, à contour anguleux, dont les côtés, toutefois, ne s’écartent pas beaucoup les uns des autres, s’arrondissent sur la paroi opposée ; la raison en est que la lumière, lorsqu’elle atteint son plein achèvement, prend plus aisément cette forme à laquelle elle incline naturellement.

» Mais, dira-t-on, la rondeur de cette incidence vient de ce que le rayon descend en ligne droite du corps sphérique du Soleil ; elle ne se produit nullement en vertu d’une semblable diffusion ; ce qui semble le prouver, c’est qu’au temps d’une éclipse de soleil, cette tache produite par l’incidence des rayons solaires apparaît en forme de faucille ; elle est exactement disposée comme la partie du disque solaire qui n’est pas obscurcie par le corps de la Lune. »

À cette objection, que va répondre notre auteur ?

Il observe, comme Bacon l’avait déjà fait avant lui, qu’on peut, dans le faisceau lumineux qui a franchi le petit trou, distinguer deux parties ; une partie interne est d’un très vif éclat ; elle est entourée d’une région, d’une certaine épaisseur, où l’éclairement est moins brillant. Pour qui raisonne exactement à l’aide des principes de l’Optique géométrique, la partie brillante se construirait en réduisant à un simple point le trou qui livre passage à la lumière ; la partie moins éclairée est une pénombre qu’expliquent les dimensions non négligeables de ce trou.

Ce n’est pas ainsi que notre auteur comprend cet effet.

La partie brillante, qu’il nomme la lumière primaire, lui parait due aux rayons qui émanent en ligne droite du disque solaire ; à cette partie, les règles de l’Optique géométrique lui semblent applicables ; c’est, à son gré, cette partie, et cette partie seulement, qui, au moment d’une éclipse de soleil, se montrera échancrée de même façon que le disque solaire.

Quant à la lumière de la pénombre, à celle qu’il appelle la lumière secondaire, il la croit engendrée par la lumière primaire, qui se répand dans le milieu environnant en vertu de sa tendance à former des ondes sphériques ; « elle s’étend extérieurement, dit-il, d’une manière accidentelle, par une naturelle diffusion en rondeur — Illa quæ exterius naturali diffusione in rotunditatem deducitur per accidens. » Cette lumière secondaire, il la conçoit exactement comme nous comprenons aujourd’hui, au sein du cône d’ombre d’un corps noir mis devant un point lumineux, la lumière engendrée par la diffraction. Nous pouvons donc dire que notre auteur a parfaitement vu comment l’hypothèse au gré de laquelle