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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome III.djvu/56

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LE SYSTÈME D’HÉRACLIDE AU MOYEN ÂGE

Comme le remarque fort justement Th. H. Martin, il serait invraisemblable qu’en attribuant à Vénus un tel mouvement, Héraclide n’eût point étendu une supposition semblable à Mercure. En tous cas, nous l’allons voir, les philosophes grecs ou latins qui ont adopté son hypothèse l’ont toujours entendue, à la fois, de Vénus et de Mercure.

Héraclide du Pont, ou quelqu’un des astronomes hellènes qui Font suivi, a-t il appliqué cette même hypothèse aux trois planètes supérieures, à Mars, à Jupiter et à Saturne ? A-t-il attribué à toutes les étoiles errantes un mouvement de révolution autour du Soleil, tandis qu’il laissait la Lune et le Soleil tourner autour de la Terre immobile ? A-t-il, en un mot, construit de toutes pièces le système qu’à la fin du xvie siècle, Tycho Brahé devait proposer ? À cette question, Giovanni Schiaparelli a cru pouvoir répondre affirmativement [1]. Son opinion, suggérée par des conjectures d’une extrême ingéniosité, est loin d’être dénuée de vraisemblance. Toutefois, aucun texte ne lui confère la certitude. Si l’hypothèse d’Héraclide s’est trouvée, dès l’Antiquité, généralisée au point d’engendrer le système tychonien, les Anciens ne nous en ont point laissé le témoignage formel, en sorte que cette théorie a bien pu être conçue, mais qu elle n’a pu, assurément, exercer aucune influence sur la formation du système de Copernic ou du système de Tycho Brahé.

Il n’en est pas de même de cette théorie réduite aux seuls mouvements de Mercure et de Vénus. Restreinte à ces deux astres, elle n’a jamais été oubliée des astronomes grecs et romains, parmi lesquels elle semble avait recruté de nombreux adhérents.

Th. H. Martin pense que Chalcidius avait emprunté à quelque ouvrage perdu d’Adraste d’Aphrodisias ou de Théon de Smyrne le résumé qu’il nous a transmis de la doctrine d’Héraclide du Pont. Ce qui est certain, c’est que Théon de Smyrne, dans une partie de son Astronomie où il ne fait que résumer les enseignements d’Adraste, se montre [2] nettement favorable à cette doctrine :

« Quant au Soleil, à Vénus et à Mercure, dit-il, il est possible

1. Giovanni Schiaparelli Origine del Sistema planetario eliocenirico presso i Greci (Memorie del Instituto Lombardo di Science e Lettere, Classe di Scienze matematiche e naturali, vol. XVIII, p. 61, 1898). — Voir : Première partie, Chapitre VIII, | III ; t. I, pp. 44*-452* ,

2. Theonis Smyrnaei Platonkci Liber de Astronomia, cap. XXXIII ; éd. Th. H. Martin, pp. 294-299- — Théon de Smyrne, philosophe platonicien, Exposition des connaissances mathématiques utiles pour la lecture de Platon, traduite par J. Dupuis ; Paris, 1892. Troisième Partie : Astronomie ; c. XXXIII, pp. 300-303.

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