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L’ASTRONOMIE PARISIENNE. — II. LES PHYSICIENS

à l’écliptique ; le mouvement de trépidation appartient au neuvième orbe et le mouvement diurne au dixième ; ces doux orbes privés d’astre forment le Ciel cristallin que surmonte un Empyrée immobile. Le Ciel aqueux, dont les anciens docteurs ont cru, sur l’autorité de l’Écriture, devoir admettre l’existence, n’est sans doute autre chose que le Ciel cristallin,

L’Université naissante de Heidelberg attribue donc à la fois au ciel étoilé le mouvement uniforme de précession et le mouvement de trépidation. Elle adopte sur ce point l’opinion professée par les Tabulæ régis Alfonsii. Afin que la sphère étoilée puisse ainsi participer d’un triple mouvement, elle la surmonte de deux sphères mobiles dépourvues d’astres ; ainsi faisait Albert de Saxe. « Quant à la constitution des sphères planétaires qui se trouvent au-dessous de la huitième sphère, poursuit Marsile d’Inghen[1], deux opinions se partagent les modernes,

» Selon la première opinion, à chaque planète correspondent trois sphères ou trois orbes qui entourent la Terre ; l’un de ces orbes, qui est l’orbe intermédiaire, est d’uniforme épaisseur ; les deux autres sont d’épaisseur variable, et la partie la plus mince de l’un se trouve vis-à-vis de la partie la plus épaisse de l’autre. C’est l’hypothèse la plus communément répandue touchant les excentriques.

» Selon l’autre opinion, une même matière continue s’étend de la huitième sphère jusqu’à la convexité de l’élément igné ; au sein de cette matière continue, se trouvent sept cavités en lesquelles sont inclus sept anneaux, compris dans la largeur du Zodiaque ; ces sept anneaux servent aux mouvements des sept planètes. Cette opinion semble la plus vraie ; c’est celle que la raison naturelle doit approuver de préférence, car elle est celle qui entraîne le moins d’inconvénients. »

Ainsi non seulement Marsile d’Inghen présente à ses élèves de Heidelberg le système prôné par Bernard de Verdun comme l’hypothèse la plus répandue touchant les excentriques, mais encore il leur fait connaître l’hypothèse plus simple des orbes annulaires qu’avaient recommandée les Hypothèses des planètes, Gilles de Rome et les Conclusions sur la théorie des planètes.

Lorsqu’en 1382, Marsile d’Inghen avait quitté l’Université de Paris, il n’était point seul à l’abandonner ; bon nombre de maîtres illustres, émus des désordres qu’engendrait la lutte entre le pape de Rome et le pape d’Avignon, quittaient les rives de la Seine

  1. Marsile d’Inghen, loc. cit., vol. II, fol. CCXLIII.