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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE

Voici d’abord, comment, dans la quatrième différence de son Lucidator, le Médecin padouan, entre le système d’Al Bitrugi et le système de Ptolémée, définît le système auquel nous faisons allusion1 :

a Certains, qui sc font comme les intermédiaires entre ceux-là, admettent des excentriques et des épicycles et, par là, ils s’accordent avec Ptolémée. Mais, d autre part, ils supposent que les planètes sont fixement serties eu leurs sphères et qu’elles se meuvent seulement du mouvement de rotation de res sphères, comme se meut le premier orbe ; par là, ils s’accordent avec les Egyptiens cl avec Aristote ; comme eux, ils veulent sauver ce qui se voit ft’Mïz .scriwe) et, en même temps, ils redoutent la corruption du ciel par l’effet de la division, de la raréfaction ou de la condensation. »

Le système que Pierre d’Abano caractérise en ces termes quelque peu brefs n’est autre, assurément, que le système proposé par les Hypothèses des planètes et nommé par Bacon ymaffinalio modernorum.

Pas plus que Bacon, Pierre de Padoue ne veut admettre cette imagination des modernes ; en effet2, « bien qu’elle sauve un grand nombre d’apparences, elle ne les sauve cependant pas toutes ; elle ne sauve pas, en particulier, ce qui apparaît touchant le mouvement en latitude ; cela exige, en effet, que Pépicycle se meuve, au sein «le l’orbe, d’une manière non uniforme, ce qu’ils n’admettentpas ; elles ne sont pas, non plus, en état d’assigner la durée de la rétrogradation apparente ; et, d’ailleurs, elles n’échappent pas à l’argument tiré par Aristote de la tache de la Lune, comme on le verra dans la différence suivante. » Ces difficultés et quelques autres, signalées d une manière concise et assez obscure par Pierre d’Abano, sont bien celles que Bacon faisait valoir contre la représentation de l’Astronomie de Ptolémée à l’aide d’orbes solides ; Bernard de Verdun avait vivement réfuté ces arguments ; de cette réfutation, il ne semble pas que le Médecin padouan ait eu connaissance.

Nous venons d’entendre Pierre d’Abano emprunter au Stagirite, par l’intermédiaire, peut-être, de Roger Bacon, l’observation que la tache de la Lune garde toujours même ligure, et s’en faire argument contre les Hypothèses des planètes ; il nous a promis, à ce propos, que cette question serait reprise en la différence suivante. 1. Ms. cit., fol. coll. b et c.

2. Ms. cit , fol. ii5, col. a.