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L’ASTRONOMIE LATINE AU MOYEN ÂGE

Buono de Lucques admet, pour l’erreur commise dans l’évaluation julienne de l’année, l’estimation qui était courante de son temps, et dont Joannes de Sacro-Bosco semble s’être seul écarté ; comme cet auteur, il réclame une correction du calendrier.

Le problème de la réforme du calendrier, si nettement posé dès le milieu du xiiie siècle, allait attendre sa solution jusqu’à la fin du xvie siècle ; c’est que les principes astronomiques propres à le résoudre exactement étaient encore fort loin de se trouver assurés.

Si la nécessité de réformer le calendrier était de mieux en mieux reconnue par les astronomes du xiiie siècle, de plus en plus grande, en revanche, leur apparaissait la difficulté du problème qu’il fallait résoudre pour que cette réforme pût être accomplie. Le traité De motu octavæ sphæræ, attribué à Thâbit ben Kourrah, dont la lecture se répandait parmi eux, faisait nettement ressortir les divergences qui existaient entre les astronomes tant au sujet de l’évaluation du mouvement de précession des équinoxes qu’au sujet de la détermination de l’année tropique. Bien plus ! En substituant le mouvement d’accès et de recès des points équinoxiaux au mouvement continuellement direct admis par Hipparque et Ptolémée, ce traité refusait à l’année tropique une durée invariable. Plus donc la réforme du calendrier semblait souhaitable, plus douteux apparaissaient les principes propres à la réaliser,

De l’inquiète hésitation où les hommes les plus experts en Astronomie se trouvaient ainsi suspendus, deux ouvrages importants nous rendent témoignage ; l’un est le Computus de Robert Grosse-Teste ; l’autre est le Computus major de Campanus de Novare.

Nous avons déjà parlé [1] du Computus episeopi Linconiensis ; nous en avons cité ces passages : « Selon Ptolémée, la longueur de l’année est moindre que la longueur assignée par Abrachis (Hipparque) et par les premiers fondateurs du calendrier… Si donc, au bout de 300 ans de notre calendrier, on retranchait un jour, le Soleil, à la fin de ces 300 ans, reviendrait à la position qu’il occupait au commencement, et notre calendrier deviendrait exact, du moins si la longueur véritable de l’année est celle qu’admet Ptolémée.

» Mais, selon Albatégni, la véritable durée de l’année est inférieure d’un centième de jour à la durée admise par Abrachis et par les fondateurs du calendrier ; dès lors, pour la même raison

  1. Voir : Deuxième partie, Ch. V, § VI ; tome III, pp. 280-281.