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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome IX.djvu/10

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CHAPITRE XV
LA THÉORIE DES MARÉES

I
GUILLAUME D’AUVERGNE

Les premiers docteurs du Moyen Âge s’étaient enquis des lois de la marée auprès de Saint Ambroise, écho de Saint Basile, puis auprès du naturaliste Pline ; ces auteurs leur avaient donné, touchant le flux et le reflux de la mer, des notions sommaires mais, en général, fort exactes. La science acquise de la sorte avait atteint son plus haut degré dans le traité De temporum ratione composé par Bède le Vénérable. Bède, d’ailleurs, enrichissant cette science du fruit de ses propres observations, avait formulé, le premier, la loi de l’établissement du port.

Puis, aux âges suivants, la théorie qui met la marée sous la dépendance de la Lune avait subi, chez beaucoup de Scolastiques, une sorte de recul ; d’autres explications avaient été proposées qui n’invoquaient aucune cause astrale ; telle était l’explication de Paul Diacre, qui attribuait la marée, à des gouffres chargés d’absorber, puis de vomir périodiquement les flots de la mer ; telle était l’explication de Macrobe qui, dans la marée, voyait un effet du conflit entre les courants qui sillonnent les divers bras de l’Océan.

Ces explications erronées partaient d’observations exactes qui les rendaient séduisantes pour les riverains de l’Océan, de la Manche, de la Mer d’Irlande. Les marins venus des pays du Nord leur avaient confirmé l’existence du Maelström, dont le tourbillon change de sens quand la marée se renverse ; ils avaient fréquemment entendu parler des courants de flot ou de jusant qui parcourent avec tant de violence certaines parties de la Manche ou de la Mer d’Irlande ; ces observations le ?