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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome IX.djvu/312

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LES PETITS MOUVEMENTS DE LA TERRE


XV
LA GÉOLOGIE DE BURIDAN ET L’UNIVERSITÉ DE PARIS.
II. LES DISCIPLES : ALBERT DE SAXE, THÉMON, MARSILE D’INGHEN, PIERRE D’AILLY


De l’hypothèse sur laquelle Buridan a fondé sa Géologie, Oresme disait : « C’est une belle ymagination que j’ay aultre fois pensée. » Plus tard, des doutes se sont présentés à son esprit, qui ont fait de lui sinon un adversaire, du moins un irrésolu. Semblable hésitation ne paraît pas avoir fait balancer l’acquiescement des autres physiciens qui, dans la seconde moitié du xive siècle, illustraient l’Université de Paris ; parmi eux, nous n’allons plus trouver que dés partisans du système proposé par le Philosophe de Béthune.

Le premier de ces partisans, c’est Albert de Saxe ; l’adhésion très explicite qu’il a donnée aux doctrines de Buridan a une grande importance historique ; ses écrits, en effet, compteront nombre d’éditions à la fin du xve siècle et au commencement du xvie siècle, tandis que les Questions de Buridan sur les Météores et sur le Traité du Ciel sont encore inédites ; c’est donc par Albert de Saxe que les physiciens de la Renaissance ont connu la Géologie du Maître picard ; c’est, en particulier, par Albert que Léonard de Vinci est devenu, de cette Géologie, un adepte convaincu.

Albert accepte pleinement l’hypothèse, admise par Buridan, que les moindres changements de densité provoquent des mouvements incessants de la terre ; il l’adopte si bien qu’il va jusqu’à penser à un petit mouvement diurne provenant de ce chef.

« En fait, dit-il[1], la terre se meut sans cesse ; sans cesse, en effet, il est une partie de la terre dont la gravité est diminuée plus qu’elle ne l’est du côté opposé ; c’est la partie qui regarde le Soleil ; or, par suite du mouvement circulaire du Soleil au-dessus de la terre, cette partie change d’instant en instant ; afin donc que le centre de gravité de la terre demeure au centre du Monde, et puisque la partie de la terre qui s’allège change continuellement, il faut que la terre se meuve sans cesse. »

Mais le mouvement terrestre auquel Albert attache le plus

  1. Alberti de Saxonia Quæstiones in libros de Cælo et Mundo ; lib. II, quæst. X.