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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome IX.djvu/321

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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

des projectiles. C’est dans l’exposé de cette doctrine qu’il insère des considérations sur l’équilibre de la terre[1].

« Archimède, qui est sans peine le prince des mathématiciens » est aussi, au gré de Vazquez, l’auteur de cette doctrine :

« En ce qui concerne la gravité, la terre et tous les graves qui prennent appui sur elle forment si bien un corps unique que ce corps est équilibré par le poids de toutes ses parties…

» La terre… est par les poids de ses diverses parties, équilibrée au centre du Monde de telle façon que son centre de gravité, qui est indivisible, pénètre le centre de grandeur de l’Univers entier.

» Lors donc que ce point, qui est le centre de gravité de la terre, coïncide avec le point qui est centre de grandeur du Monde entier, la terre est en repos. Mais ce centre de gravité n’a aucune dimension, il est indivisible. Dès lors, si la gravité pesait davantage d’un côté de la terre, le centre de gravité changerait de position et la terre ne demeurerait pas immobile dans l’état où elle se trouvait auparavant… Quand donc le centre de gravité vient à changer, si petit que soit ce changement, la terre se met en mouvement, elle éprouve une oscillation, une trépidation, afin que le nouveau centre de gravité vienne coïncider avec le centre de l’Univers ; alors, derechef, ses poids s’équilibrent exactement de toutes parts, et elle revifent au repos…

» Dès là, donc, que, d’un certain côté, un corps viendra se conjoindre à la terre, le centre de gravité se trouvera changé, et la terre prendra le mouvement de trépidation que nous avons dit. »

Dans la Compagnie de Jésus, la voix de Vazquez trouva des échos.

En 1622, le Jésuite Paul Guldin publiait à Vienne une Dissertation physico-mathématique du mouvement de la Terre, provenant du changement de son centre de gravité[2]. Le savant géomètre, fort de l’autorité d’Aristote, y posait en principe cette proposition : « Tout corps grave non empêché dont le centre de gravité n’est pas conjoint au centre de l’Univers, se meut jusqu’à

  1. Commentariorum ac disputationum in primam partem Sancti Thomæ. Tomus secundus. Complectens quæstiones à XXVII usque ad LXIV, et a quæstione CVI usque ad CXIV. Auctore R. P. Gabriele Vazquez Bellomontano theologo, Societatis Jesu. Antverpiæ, apud Petrum et Ioannem Belleros, MDCXXI. Disputatio LXXXI, cap. III, art. 20-22, pp. 527-528.
  2. Dissertatio physico-mathematica de motu Terræ, ex mutatione Cerdri gravitatis ipsius, proveniente.