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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome IX.djvu/34

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LA THÉORIE DES MARÉES


IV

ROBERT GROSSE-TESTE ET SES DISCIPLES : ROGER BACON, PIERRE D’AUVERGNE, LES PREMIERS SCOTISTES


L’opuscule Sur le destin, faussement attribué à Saint Thomas d’Aquin, nous a montré les astrologues du Moyen Âge aux prises avec cette loi, qu’il leur était difficile de justifier : La nouvelle Lune détermine de vives eaux aussi bien que la pleine Lune. Il est une autre proposition qui ne les embarrassait pas moins, et c’est celle-ci : La mer atteint son plein en un lieu aussi bien, lorsque la Lune passe au méridien au-dessus de l’horizon de ce lieu que lorsqu’elle passe au méridien au-dessous de l’horizon. De cette vérité d’expérience, nous allons entendre Robert Grosse-Teste proposer une explication qui trouvera faveur auprès de nombreux scolastiques.

Pour l’Évêque de Lincoln comme pour Guillaume d’Auvergne et, surtout, comme pour Albert le Grand, le flux est une ébullition de la mer provoquée par les rayons lumineux de la Lune.

Dans un de ses opuscules, Robert Grosse-Teste enseignait[1] que le Soleil n’est pas chaud par nature, mais que la chaleur est engendrée par la condensation et la réfraction des rayons solaires au sein des corps d’ici-bas.

Il montrait comment la lumière du Soleil, « en se condensant dans la profondeur de l’eau, échauffe cette eau, et l’échauffe à tel point qu’elle ne peut plus demeurer sous la nature de l’eau et qu’elle finit par passer à la nature de l’air ; mais la nature de l’air ne saurait demeurer perpétuellement au-dessous de l’eau ; l’air monte donc à la surface de l’eau dans une bulle que forme cette même eau...

» Si l’on veut constater d’une manière sensible cette ascension des bulles, qu’on mette de l’eau très claire dans un plat de cuivre bien net ; par l’effet de la chaleur du feu qui a été disposé sous ce plat, on verra manifestement les bulles se former et monter ; ici et là, en effet, les bulles sont engendrées de la même manière. »

1. Roberti Linconiensis Traclatus de impressionibus elementorum (Roberti Linconiensis Opuscula, Venetiis, 1514, fol. 9, col. b et c.).

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