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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome IX.djvu/343

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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

de la Terre qui est très petite au regard du Ciel, sans multiplier tant d’opérations si diverses et si oultrageusement grandes, il s’ensuit que Dieu et Nature les auroient pour néant faictes et ordrenées ; et c’est inconvénient, comme dit est.

Item, posé que tout le Ciel soit meu de mouvement journal et, ouvecques ce, que la VIIIe espère soit meue d’autre mouvement, sicomme mettent les astrologiens, il convient selon euls une IXe espère qui est meue seulement de mouvement journal.

Mes, posé que la Terre soit meue comme dit est, le VIIIe Ciel est meu d’un seul mouvement tardif.

Et ainsi, par ceste voie, il ne convient pas songier ne adunner[1] une IXe espère naturelle, invisible et sans estoilles, car Dieu et Nature auroient pour néant faicte telle espère, quant par autre voie toutes chouses peuvent estre comme elles sont.

Item, quant Dieu fait aucun miracle, l’on doit supposer et tenir que ce fait il sans muer le commun cors de nature, fors au moins que ce peut estre ; et doncques, si l’on peut sauver que Dieu aloisgna le jour au temps de Josué pour arrester le mouvement de la Terre ou de la région de ci bas seulement, laquelle est si très petite et auxi comme un point au regart du Ciel, sans mettre que tout le Monde ensemble, fors ce petit point, eust été mis hors de son commun cors, et meismement tels corps comme sont les corps du Ciel, c’est molt plus raisonnable ; et ce peut estre ainsi salvé, sicomme il appert à la responce à la VIIe raison qui fut faicte contre ceste oppinion. Et semblablement pourroit-t-on dire du retour du Solail au temps des Ézéchias.


V. Comment telles considéracions sont profitables pour la défense de notre foy.


Or appert comme l’on ne peut monstrer par quelconque expérience que le Ciel soit meu de mouvement journal ; car comment qu’il soit posé, qu’il soit ainsi meu et la Terre non, ou le Ciel non meu et la Terre meue, si un oisel estoit au Ciel et il veist cleirement la Terre, elle sembleroit meue, et si le oiseau estoit en Terre, le Ciel sembleroit meu.

Et le voiement n’est pas pource déceu, car il ne sent ou voit fors que mouvement ; mes se il est de tel corps ou de tel, ce jugement est fait par les sens dedans, sicomme il appert en

  1. Adunner = ajouter, adjoindre.