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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome IX.djvu/345

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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

lion de la terre. Aussi n’a-t-il pas manqué d’y faire allusion dans l’exposé que nous venons de citer : « Si le Ciel n’estoit meu de mouvement journal, toute Astrologie seroit faulse, et une grande partie de Philosophie naturelle, où l’on suppose partout ce mouvement au Ciel. »

À cette « cinquième » objection, il avait fait la réponse suivante :

« Au quint, où est dit que si le Ciel ne faisoit un circuite de jour en jour, toute Astrologie seroit faulse etc., je di que non, car tous regars, toutes conjuncions, toutes oppositions, constellacions, figures et influences du Ciel seroient auxi comme il sont du tout en tout, sicomme il appert par ce que fut dit en la responce de la première expérience. Et les tables des mouvemens et tous autres livres auxi vrais comme il sont, fors tant seulement que du Ciel selon apparence et en terre selon vérité ; et ne s’ensuit autre effet de l’un plus que de l’autre. »

C’est qu’en donnant à la terre le mouvement diurne, Oresme avait bien soin de ne fixer qu’un seul ciel, le Ciel suprême, celui que les autres astronomes regardaient comme le premier mobile ; à tous les corps célestes placés au-dessous de celui-là, il gardait des mouvements relatifs à la sphère suprême identiques à ceux que l’observation leur avait fait attribuer ; ce qu’il dit des mouvements des étoiles fixes et des astres errants nous le manifeste ; il avait donc raison de dire qu’en changeant les hypothèses relatives au repos et au mouvement du Ciel suprême et de la terre, il n’apportait aucun changement à la science astronomique.

L’hypothèse de la rotation de la terre se heurtait à une autre difficulté que, depuis Aristote, on n’avait cessé de lui opposer : Une flèche, tirée verticalement en l’air, retombe exactement au lieu où elle est partie ; si la terre tournait d’Occident en Orient, l’archer, pendant que la flèche monte et redescend, se serait déplacé vers T Orient ; il devrait donc voir la flèche retomber à l’Occident de la place qu’il occupe. Cette objection était certainement la plus forte qu’on eût dressée contre les négateurs de la fixité de la terre.

Cette objection, comment la résout-on aujourd’hui ? Au moment où la flèche quitte la corde de l’arc, cette corde a, par l’effet de la rotation de la terre, une certaine vitesse ; cette vitesse est tangente au parallèle passant par le point de contact — de la’corde et de la flèche, dirigée de l’Orient vers l’Occident et d’une grandeur bien déterminée. La flèche qui part n’a pas