ou milieu du monde au sein duquel elle aurait été créée par Dieu ; ce n’est donc pas par violence, mais par nature qu’elle demeurerait en repos au centre de ce même monde. »
Pour réfuter cette objection d’Aristote : La terre de l’autre monde devrait tomber au centre de notre univers, Guillaume Varon, Jean de Bassols, Thomas de Strasbourg ont, d’un commun accord, répété la réponse qu’avait faite Godefroid de Fontaines : La terre de chaque monde tend exclusivement au centre du monde auquel elle appartient ; elle n’a aucune inclination qui la porte au centre d’un autre monde.
De cette réponse, les Péripatéticiens ne peuvent se contenter. Ce qui donne à un corps telle forme substantielle est aussi ce qui lui assigne tel lieu naturel ; l’identité de forme substantielle entraîne l’identité de lieu naturel, et deux corps ne peuvent avoir des lieux propres distincts s’ils n’ont des formes substantielles distinctes ; dire qu’une terre a pour lieu propre le centre de tel monde, et qu’une autre terre a pour lieu propre le centre de tel autre monde, c’est déclarer que ces deux terres n’ont pas la même forme substantielle, qu’elles ne sont pas de même espèce ; l’argument d’Aristote garde donc toute sa force pour démontrer qu’il ne saurait exister deux mondes de même espèce.
Déjà Jean de Bassols avait prévu qu’on lui ferait cette objection ; de son temps, en effet, elle était formulée avec insistance par Jean de Jandun.
Jean de Jandun, contre presque tous les docteurs de son temps, soutient avec fermeté qu’il ne saurait exister plusieurs mondes[1]. « C’est évident, dit-il, par l’autorité d’Aristote et du Commentateur, et cela se prouve par le raisonnement de Frère Thomas. » C’est de Saint Thomas d’Aquin, en effet, que s’inspire très directement son argumentation. Or nous lisons dans cette argumentation :
« Ici se présente une chicane… Il serait possible, semble-t-il, qu’il y eût un autre monde et, cependant, que la terre de ce
- ↑ Joannis de Janduno Quæstiones in libros Aristotelis de Cælo et Mundo ; lib. I, quæst. XXIV : An sit possibile esse plures mundos.