Aller au contenu

Page:Duhem - Le Système du Monde, tome VI.djvu/16

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

premier plan de la Philosophie latine du xiiie siècle. Ils constituent, dans les idées de l’époque, le grand courant du Péripatétisme depuis l’Antiquité. On ne trouve mentionnés ni Platon, que l’on considérait comme un allié du Christianisme et dont l’œuvre littéraire tenait peu de place en ce temps ; ni Avicébron, dont le Fons vitæ était déjà traduit, mais dont les tendances néoplatoniciennes n’ont soulevé des appréhensions un peu sérieuses que dans l’École Albertino-thomiste. Ce que le De erroribus philosophorum cherche à mettre en évidence, c’est l’ensemble des erreurs issues des doctrines du Péripatélismc primitif et de ses grandes dérivations…

» D’autres noms auraient pu être ajoutés à ceux qui précèdent, qui n’étaient sans doute pas ignorés de l’auteur. Mais notre critique, avec beaucoup de décision, écarte ce qui n’est pas très représentatif et se limite aux grandes autorités sous le patronage desquelles l’erreur philosophique venait battre, en son temps, le dogme chrétien. »

« Le De erroribus philosophorum[1] est particulièrement remarquable par l’intelligence doctrinale de son rédacteur. Dressant, en quelque sorte, un simple catalogue de propositions brièvement énoncées, l’auteur trouve pourtant le moyen de nous faire saisir, spécialement pour Aristote qui est le point de départ du Péripatétisme subséquent, le lien logique qui unit les unes aux autres les grandes thèses jugées erronées. Les quelques remarques par lesquelles il caractérise, en passant, tel de ses philosophes ou leurs doctrines sont typiques et pleines de justesse. Nous signalons plus spécialement l’exposé qu’il consacre à Aristote, parce que, plus que partout ailleurs, nous y discernons la pénétration de son jugement, et la position philosophique qu’il adopte lui-même. »

La principale erreur que notre auteur reproche à Aristote[2], c’est d’avoir affirmé l’éternité du Monde ; il la lui reproche sous les diverses formes qu’elle a revêtues aux divers ouvrages du Stagirite : Le mouvement n’a pas eu de commencement ; le temps est éternel ; le Monde n’a pas commencé ; le ciel n’a pas été fait ; la génération et la corruption n’ont ni commencement ni fin ; afin de causer cette génération et cette corruption incessantes, le Soleil se meut d’un mouvement perpétuel ; il n’y a eu ni un pre-

1. P. Mandonnet, loc. cit., p. XX.

2. De erroribus philosophorum, capp. I, II, III. P. Mandonnet, Op. laud., seconde partie, pp. 3-8,

  1. 1
  2. 2