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LE VIDE ET LE MOUVEMENT DANS LE VIDE

Parmi ies raisons qu’il invoque en faveur de cette conclusion, relevons seulement celles-ci :

« Je dis que Dieu a pu et peut encore maintenant créer un autre univers. Il n’y a, en effet, aucune contradiction à attribuer cette puissance à Dieu.

» Une telle contradiction ne peut provenir de la chose dont ce nouvel univers devrait être fait, puisque Dieu n’a pas fait le Monde de quelque chose.

» Elle ne provient pas du réceptacle de cet univers nouveau, car le Monde, pris en sa totalité n’est pas reçu en quelque espace (spatium). Le Philosophe dit, au premier livre Du Ciel et du Monde, qu’il n’y a, hors du ciel, ni lieu ni vide ni temps ; affirmation qu’il faut entendre du ciel suprême.

» En faveur de cette opinion, on peut invoquer la sentence du Seigneur Étienne, évêque de Paris et docteur en Sacrée Théologie ; il a excommunié ceux qui enseignent que Dieu n’a pu créer plusieurs mondes. »

Richard de Middleton veut donc, comme son maître Henri de Gand, concilier cette décision d’Étienne Tempier avec le dogme aristotélicien : Il n’y a, hors du ciel, ni lieu ni temps ni vide.

Il est plus difficile de concilier ce dogme péripatéticien avec cette autre proposition : « Il n’est pas impossible à Dieu d’imprimer au ciel un mouvement de translation. »

« En effet, remarque notre auteur[1], tout mouvement de translation transporte le corps d’un lieu dans un autre. Mais de l’avis du Philosophe, au IVe livre des Physiques, le ciel ultime n’est pas en un lieu ; de son avis aussi, au premier livre Du Ciel et du Monde, il n’y a, hors du ciel ultime ni lieu ni plein ni vide. Il est donc impossible à Dieu de mouvoir le ciel ultime d’un mouvement de translation. »

Cependant, « l’article suivant à été excommunié par le Seigneur Etienne, évêque de Paris et docteur en sacrée Théologie : Dieu ne pourrait mouvoir le ciel d’un mouvement de translation. »

La contradiction entre l’enseignement du Philosophe et celui d’Étienne Tempier est malaisée à dissiper.

Richard admet bien que Dieu pourrait, hors du ciel empyrée, mouvoir une partie de ce ciel empyrée ou un corps quelconque. Le reste du ciel empyrée, demeurant immobile, fournirait un terme fixe auquel le mouvement local de ce corps pourrait être

1. Ricardi de Media Villa Quæstiones in libros Sententiarurn, lib. Il, disk XIV, art. III, quæst. III : Utrum Deus posset movere ultimum cælum motu recto. Ed. cit., tomus secundus, p. 186.

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