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LES ADVERSAIRES DE L’ASTROLOGIE

Stagirite ; de la discussion qu’il développe extrayons seulement les passages suivants[1] :

« Après ces choses, Aristote s’efforce de prouver que toute chose, soit substance ou accident ou quelconque disposicion, qui aura eu commencement, aura fin, et cessera par nécessité, et ne puet perpétuellement durer ; et semblablement, que chose qui n’aura fin ait tous jours duré sans commencement.

» Et pour ce que ce n’est pas vérité, et que ce est contre la foy quant à la première partie, je vueil monstrer l’opposicion selon Philosophie naturèle et mathématique ; et par ce, et autrement, apperra que les raisons d’Aristote ne concludent pas.

» Et premièrement je suppose avecques Aristote, combien que ce soit faulx, que le Monde et les mouvemens du Ciel sont perdurables par nécessité, sans commencement et sans fin.

» Après, je suppose, comment chose possible, que aucuns mouvemens du Ciel, simples et réguliers, sont incommensurables ; et est aussi comme l’en diroit que c’est possible que le nombre total des estoiles soit non per ; et aussi comme l’en ne puet savoir certainement ne évidemment se le nombre de toutes les estoilles est per ou non per, semblablement touz les hommes morteiz qui furent et qui seront ne pourroient, en lumière naturel, trouver ne savoir de certain se touz les mouvemens, de Ciel sont commensurables, car pour une partie de mouvement, laquelle seroit insensible et imperceptible posé que elle fust cent mile fois plus grande, II mouvemens quelsconques du Ciel ou autres seroient incommensurables, qui sembleroient estre commensurables. Et ceci est tout notoire ou manifeste à ceulz qui sont exercités en Géométrie. Et doit l’en savoir que les choses sont commensurables quant tèle proporcion comme à] une l’autre puet estre trouvée en nombres ; et quant elle ne’puet les choses sont incommensurables.

» Et que aucuns des mouvemens du Ciel soient incommensurables, c’est plus vraysemblable que ne est l’opposite, si comme je monstray jadis, et pluseurs persuasions, en un traictié intitulé : De commensurabilitate vel incommensurabilitate motuum Celi. »

Vers la fin de son argumentation, Oresme évoque une seconde fois le souvenir de ce traité : « Et tout ce que dit est, qui touche l’incommensurableté dessus dicte, est évidemment desclarié par

  1. Nicole Oresme, Traictié du Ciel et du Monde, livre I. Au XXIXe chapitre « il détermine de ce qui est possible ou regart d’aucune puissance » (Bibliothèque, Nationale, fonds français, ms. no 1093, fol. 25, col. a-d).