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Page:Duhem - Le Système du Monde, tome X.djvu/166

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LES UNIVERSITÉS DE L’EMPIRE

impossible ; en effet, cet état de l’Univers que Dieu a ordonné ne pourrait être conservé si le vide existait, et voici comment on le voit : Les corps qui sont dans l’Univers et qui le constituent se conservent parce qu’ils se touchent les uns les autres ; c’est par ce contact que chaque corps conserve son voisin ; or, si le vide était admis, les corps n’auraient plus, entre eux, voisinage ni contact ; la vertu conservative ne trouverait plus d’intermédiaire pour se transmettre des corps supérieurs aux corps inférieurs.

» Il est donc évident que le vide irait tout à fait contre l’intention de la nature universelle ; la nature, en effet, tend à conserver tout l’Univers et, dans le vide, elle ne le pourrait conserver.

» En second lieu, il y a [contre l’existence du vide] répugnance de la nature particulière, car la nature particulière désire d’appétit naturel sa propre conservation ; si le vide était admis, cet appétit se trouverait totalement frustré, car la nature particulière ne pourrait être conservée.

» En troisième lieu, enfin, la même chose se voit par nombre d’expériences ; on voit, en effet, les natures particulières se mouvoir contre leur nature propre et se détruire elles-mêmes afin d’éviter le vide ; c’est ce que montre un liquide lorsqu’il monte dans un vase où l’entrée de l’air n’est pas permise. Pourquoi les natures particulières se meuvent contre leur-nature propre et se détruisent, en voici la raison : Chaque chose particulière incline plus fortement à conserver le tout que la partie… Comme l’admission du vide entraînerait la destruction de l’Univers tout entier, chaque nature particulière désire sa propre destruction plutôt que de laisser périr l’Univers ; et cela parce que les parties ne pourraient subsister si le tout était détruit, bien que le contraire soit possible. Partant, la partie a plus fort appétit de la conservation du tout [que de sa propre conservation], car c’est du tout que dépend l’existence absolue (esse simpliciter), et l’existence, c’est ce que souhaitent toutes choses. »

Lambert se pose également la question suivante[1] : Si un grave simple était placé dans le vide, son mouvement y serait-il subit ou successif ? Voici ce qu’il répond :

  1. Lamberti de Monte, Op. laud., lib. IV ; éd. cit., fol. lxxxiv, col. c et d.